On a parfois l’impression que Pallade Musica vient à peine de voir le jour, mais en fait, le quatuor baroque en est déjà à sa sixième saison, et a mis au monde deux albums. Ludwig van Montréal a rencontré les membres de ce petit ensemble qui se démarque par son originalité et la qualité de ses prestations et qui présentera un concert à la Chapelle Saint-Louis, ce vendredi, et un autre vendredi prochain, le 2 février.
Elinor Frey (violoncelliste), Mélisande McNabney (clavecin), Tanya LaPerrière (violon) et Esteban de la Rotta (théorbe, luth, guitare) sont des musiciens très actifs. Chacun de leur côté, ils font partie de divers ensembles. Elinor Frey, par exemple, joue régulièrement au sein d’Arion, de l’Ensemble Caprice et des Idées heureuses. Mais Pallade Musica, c’est leur bébé.
« Oui, on joue chacun de notre côté avec différents ensembles, mais ce qui est particulier avec Pallade Musica, c’est que nous avons une entière liberté artistique, dit Tanya Laperrière. On choisit le répertoire, le style dans lequel on approche les œuvres, et c’est la raison pour laquelle on veut avoir un ensemble à nous. C’est très satisfaisant. On est toujours heureux de jouer dans différents ensembles reconnus, mais on est particulièrement fiers de notre bébé et de chacun de nos disques. »
À l’instar de la génération précédente, qui a fondé les premiers ensembles baroques à Montréal, comme le SMAM, les Idées heureuses et Arion, les quatre musiciens ont compris que pour avoir du travail, il faut provoquer des occasions.
« Je crois qu’il est important pour chaque personne, dans le milieu musical, de créer ses opportunités, dit Elinor Frey. Nous sommes l’un des ensembles baroques les plus actifs à l’extérieur du Québec. Nous avons beaucoup joué aux États-Unis : San Francisco, Los Angeles, Pittsburgh, Seattle, New York, et on gagne des revenus significatifs avec ça. C’était aussi une expérience de gestion pour nous : devenir une OSBL, rechercher des subventions et ainsi de suite. On apprend beaucoup de cela. »
Tout a commencé un peu par hasard.
« On se côtoyait depuis un certain temps dans les ensembles et on constatait qu’on avait des affinités, raconte Tanya Lapperrière. On s’est mis à jouer ensemble pour le plaisir, à la librairie Nota Bene, et ça a cliqué. Elinor a suggéré que l’on s’inscrive au concours Early Music America’s Baroque Competition et on a commencé à répéter comme des fous. On a gagné le concours qui venait avec une tournée de concerts, et on a décidé de continuer ensemble. Notre premier album a été en nomination aux Prix Opus. »
Chaque année, ils essaient de développer de nouveaux projets et d’améliorer leur visibilité. Cette année, par exemple, l’ensemble a reçu une bourse du CALQ pour étendre ses activités de saison à Québec, où ils ont joué au Musée de l’Amérique francophone.
« On a commencé, aussi, à soutenir d’autres artistes que l’on invite avec nous, pour notre saison régulière ou nos tournées, dit Estaban de la Rotta. On essaie aussi de faire de la musique qui n’est pas très connue, que ce soit une découverte tant pour nous que pour le public, comme Schieferlein. »
Schieferlein
Ce Schieferlein, dont ils ont enregistré trois Sonates en trio sous étiquette ATMA Classique, c’est Tanya Laperrière qui l’a déniché en fouillant dans des partitions, dans une bibliothèque, en Belgique.
« Sa musique n’était pas publiée, et encore moins enregistrée, dit-elle. C’est un manuscrit que j’ai trouvé au Conservatoire Royal de Bruxelles, il y a quatre ans. J’ai ramené ça ici et on trouvait cela vraiment bon. On a joué une des sonates plusieurs fois en tournée, puis on a décidé d’apprendre les autres. »
Il y a peu d’informations disponibles sur Otto Ernst Gregorius Schieferlein, né en 1704 et mort en 1787. On sait toutefois qu’il a assuré un intérim de six mois, entre Telemann et Carl Philipp Emanuel Bach, comme directeur musical des églises de Hambourg.
« Schieferlein travaillait avec Telemann, ajoute Elinor Frey. Il était copiste et chanteur. C’est lui qui a assuré la transition, en attendant que C.P.E Bach soit nommé à ce poste. C’est pourquoi nous avons mis des pièces de ces deux autres compositeurs sur notre disque, avec celles de Schieferlein. »
Après la découverte des partitions, ils ont effectué des recherches sur Schieferlein pour mieux comprendre qui il était.
« Mes professeurs, à Bruxelles, ne le connaissaient pas, dit Tanya. Même dans les encyclopédies de la musique, ses œuvres ne sont pas mentionnées. C’était le but de mon mémoire de maîtrise de faire une édition critique d’une pièce inédite. Au Conservatoire de Bruxelles, il y a une foule de manuscrits inédits et tous les étudiants en interprétation doivent faire cela. C’est intéressant car ça oblige à découvrir de nouvelles choses. De plus, les jeunes ensembles ne peuvent plus donner des concerts comme il y a trente ans. Il faut présenter du nouveau pour se démarquer, faire les choses autrement. »
« C’est important, comme interprètes de la musique baroque, de faire un travail musicologique, dit Elinor Frey. Moi-même, j’ai enregistré trois disques de pièces méconnues. Je pense que c’est aussi essentiel de trouver du nouveau répertoire à enregistrer. »
Concerts à venir
Pour son prochain concert, Pallade Musica présente Elinor Frey dans des sonates de Giuseppe Maria Dall’Abaco.
« La Chapelle Saint-Louis est très intime, ça sonne bien. Le son est parfait pour la musique de chambre », dit la violoncelliste.
Le concert suivant aura lieu le 2 février, au même endroit. Intitulé « Un accent français », le programme présentera des œuvres de Rebel, Couperin, Berteau et Vallet. Ariane Bottex, experte du vieux français, récitera de la poésie française.
Les autres concerts de Pallade Musica auront lieu en avril et mai. Pour plus de détails, visitez leur site web.
Pallade Musica présente Elinor Frey, 26 janvier, 19 h 30, Chapelle Saint-Louis, 4230 rue Drolet.
Concert Un accent français, 2 février, 19 h 30, Chapelle Saint-Louis, 4230 rue Drolet.
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