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CRITIQUE | Festival d'opéra de Québec : bravo aux talents locaux!

Par Béatrice Cadrin le 30 July 2024

Olivier Bergeron; Élisabeth St-Gelais; Frédéric Antoun.

En fin de semaine dernière avaient lieu les premiers concerts en salle de l’édition actuelle du Festival d’opéra de Québec. Samedi soir était donné au Palais Montcalm le Grand concert du Festival, auquel participaient Les Violons du Roy sous la direction de Nicolas Ellis, ainsi que les solistes Isabelle Cals, soprano, et Frédéric Antoun, ténor. Dimanche après-midi, c’était au Théâtre La Bordée sur la rue St-Joseph qu’avait lieu le rendez-vous musical, pour la deuxième représentation de La voix humaine de Francis Poulenc, précédée de Je chante la nuit et autres mélodies (une première représentation avait eu lieu vendredi soir).

Grand concert du Festival d’opéra de Québec

Le programme du Grand concert présentait un panorama de l’opéra classique français, prenant le soin d’établir longuement le point de départ marquant que représente Gluck (Iphigénie en Aulide, Iphigénie en Tauride, Alceste et Orphée et Eurydice) et aboutissant avec Les Troyens de Berlioz. Entre les deux, il y eut Cherubini avec Médée et Halévy avec La juive.

Fidèles à leur habitude d’excellence, Les Violons du Roy ont été superbes dans les pièces orchestrales comme dans les accompagnements. La flûtiste Ariane Brisson s’est distinguée par sa magnifique exécution du Ballet des ombres extrait d’Orphée et Eurydice, mais l’ensemble de la section des bois a été remarquable d’unité et de dosage, tout comme les cors d’un côté et le bloc formé par les trompettes et timbales de l’autre, malgré leur écart.

La direction de Nicolas Ellis était engagée et dynamique, habitant entièrement la nature dramatique du répertoire. Sa gestuelle emphatique et évocatrice dans les airs et les pièces orchestrales gagnerait à être réduite dans les récitatifs, l’objectif étant de guider l’orchestre sobrement sans détourner l’attention des solistes.

Ses présentations résumant l’intrigue des opéras avant chaque bloc d’extraits étaient malheureusement hésitantes et laborieuses. On comprend qu’un chef soit plus à l’aise à diriger la musique qu’il a préparée qu’à parler devant un public de façon semi-spontanée. La solution aurait été de confier la narration au directeur général du festival Jean-François Lapointe, qui a fait un discours d’introduction bien articulé sans être guindé, dans lequel il a de surcroît admis être un grand admirateur du répertoire présenté. Il est à supposer que sa familiarité avec les pièces du programme lui aurait inspiré des interventions au flot plus organique.

Parlant de familiarité, la soprano Isabelle Cals, qui a tout chanté par cœur, est manifestement familière avec ce répertoire niché, dans lequel elle a investi tout son sens dramatique. Cependant, la voix n’est pas impressionnante, en particulier les aigus qui sont minces et forcés. La diction était défaillante, ce qui représente un handicap majeur pour un concert d’extraits d’opéra sans surtitres et même sans textes imprimés dans le programme.

Son collègue d’un soir Frédéric Antoun faisait preuve au contraire d’une diction extrêmement claire. Incommodé par un torticolis, Antoun n’était pas en mesure de répondre de la même manière au jeu de Cals, ce qui n’était pas forcément un inconvénient dans le contexte de la formule choisie pour la soirée. Sa voix restait chaleureuse et vibrante, et si lui-même sentait des limitations, le public, lui, a manifesté son enthousiasme et son soutien à l’artiste.

Malgré l’intérêt des découvertes musicales, la juxtaposition d’airs en enfilade est devenue un peu monotone. L’annonce du directeur général comme quoi il aimerait monter un de ces opéras comme production principale lors d’une édition future du festival laisse penser que le concert de samedi soir tenait lieu « d’essai routier » pour jauger l’intérêt du public envers ce répertoire. Il est donc un peu étonnant que plus d’efforts n’aient pas été mis dans la présentation extra-musicale de la soirée, qui en aurait bien profité, soit dans une veine similaire à celle employée pour meubler la première partie de La voix humaine (dont il est question plus bas), soit selon une tout autre formule imaginée pour l’occasion.

Je chante la nuit et La voix humaine

Le point focal de la matinée du lendemain était bien sûr La voix humaine, que nous avions entendue dans la version stupéfiante de Barbara Hannigan à l’OSM en février dernier. L’œuvre était portée cette fois par la voix émouvante d’Élisabeth St-Gelais. Gagnante du Prix d’Europe l’an dernier, Révélation classique Radio-Canada la même année et nommée sur la liste des 30 artistes de moins de 30 ans à suivre de la CBC l’année précédente, Élisabeth St-Gelais est en pleine ascension. Pour son portrait sensible de la femme délaissée par son amant dans le monodrame de Poulenc, présenté en co-production avec les Jeunesses musicales Canada, St-Gelais module sa voix à travers toute une gamme d’émotions, de la vulnérabilité à la frustration. Les fins de phrase tenues en suspens dans un decrescendo ne voulant pas finir sont particulièrement touchantes.

La chanteuse est soutenue efficacement par Louise Pelletier au piano. Comme le soulignent les notes de programme de Benjamin Goron, la version pour piano et voix est plus âpre et brute que la version orchestrale, fournissant un décor musical d’un ordre différent dans lequel se déployent la voix et le drame de l’unique personnage.

Pour meubler la première partie, les Jeunesse musicales ont fait appel au scénariste Pascal Blanchet qui, reprenant l’idée du téléphone comme élément central de la narration, imagine le début heureux d’une histoire amoureuse en contrebalant à la souffrance de la séparation dépeinte en seconde partie. Le personnage masculin est joué par le baryton Olivier Bergeron, qui, à en juger par ce que nous avons entendu dimanche après-midi, mérite sa place sur la nouvelle liste des 30 artistes de moins de 30 ans de la CBC parue hier. La voix souple et égale de Bergeron se fait tour à tour coquine, frivole ou suppliante dans ce florilège de chansons françaises légères.

Dans une version précédente de cet article, une erreur s’était glissée dans le nom de l’auteur des notes de programme, qui était donné comme étant Benjamin Coron, plutôt que Benjamin Goron. De même, ce n’est pas le Festival d’opéra de Québec qui a fait appel au scénariste Pascal Blanchet pour Je chante la nuit, tel qu’indiqué précédemment, mais bien les Jeunesses musicales.

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Béatrice Cadrin
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