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CRITIQUE | Unique Barbara Hannigan

Par Béatrice Cadrin le 22 février 2024

Barbara Hannigan et l'OSM interprètent La Voix humaine de Francis Poulenc dans un concept alliant musique et projections sur grand écran. (Photo : Antoine Saito)
Hannigan et l’OSM dans une interprétation de La Voix humaine alliant musique et projections sur grand écran. (Photo : Antoine Saito)

Barbara Hannigan, artiste en résidence de l’OSM pour la saison en cours, domine la scène (et l’écran) de la Maison symphonique dans la présentation d’un de ses projets phares, une exécution hautement personnelle du monodrame La Voix humaine de Francis Poulenc.

Le concept est surhumain : Barbara Hannigan chante, joue et mène l’orchestre tout à la fois, tandis que trois caméras projettent son moindre geste, sa moindre expression faciale sur grand écran. Chaque dimension participe au spectacle, c’est-à-dire que les gestes de direction sont les gestes du personnage, sans que l’auditoire ne ressente jamais de décalage entre les deux. « Elle » – seul nom attribué à l’unique personnage de l’opéra – navigue sans heurts les changements de caméras, gros plans, contre-plongées, geste chorégraphiés, et disparitions et apparitions du cadre.

 

Barbara Hannigan et l'OSM interprètent La Voix humaine de Francis Poulenc dans un concept alliant musique et projections sur grand écran. (Photo : Antoine Saito)
Les moments les plus forts sont ceux où la scène et l’écran abandonnent leur synchronisme : l’image à l’écran se fige et Elle se retourne, révélant son visage directement au public pour la première fois. (Photo : Antoine Saito)

Des projections qui enrichissent le propos

Les moments les plus forts sont ceux où la scène et l’écran abandonnent leur synchronisme. Ce stratagème de mise en scène sert d’une part à simplifier les couches de lecture : l’image à l’écran se fige et Elle – amante abandonnée peinant à se définir une identité propre – se retourne, révélant son visage directement au public pour la première fois dans un moment de rare authenticité.

D’autre part, il peut être employé dans le sens inverse, provoquant une mise en abîme fascinante de complexité : alors que sur scène, la cheffe tend les bras vers l’orchestre et le personnage tend les mêmes bras vers son amant dans un effort de le ramener à elle, à l’écran, un dédoublement de l’image en miroir la place face à elle-même, s’effleurant le bout des doigts, cherchant à tâtons à établir une connexion avec elle-même.

La somme de toutes ces parties, portées par une seule femme qui se les approprie entièrement, est un spectacle extraordinaire, complètement unique. On peut parler de « La Voix humaine de Hannigan » (avec les contributions essentielles de Clemens Malinowski et de Denis Gueguin pour la vidéo) comme on parle de la Tosca de Callas ou du Ring de Chéreau : des interprétations, au meilleur sens du terme, tellement spécifiques que personne d’autre ne peut les reproduire.

Transformation négative dans Les Métamorphoses

Ce qui mène au problème de la première oeuvre au programme, Les Métamorphoses de Strauss. Nul artifice ici, mais une oeuvre touffue, exigeante même pour des chefs aguerris. Barbara Hannigan ne correspond pas à l’image conventionnelle qu’on se fait d’un.e chef.fe d’orchestre, cultive même cette différence, et c’est très bien ainsi – quand elle s’applique à des projets exploitant ses forces. Le succès d’une oeuvre comme Les Métamorphoses en concert repose cependant sur les atouts traditionnels d’un.e chef.fe : adéquation entre le geste et le son, conscience de la forme et de la conduite des voix, analyse poussée du langage musical, connaissance intime du mode de production sonore des instruments de l’orchestre.

 

Barbara Hannigan dirige les cordes de l'OSM dans Les Métamorphoses de Strauss. (Photo : Antoine Saito)
Une interprétation peu marquante : Barbara Hannigan dirige les cordes de l’OSM dans Les Métamorphoses de Strauss. (Photo : Antoine Saito)

Sans être foncièrement mauvaise, l’exécution d’hier soir n’a rien contribué de marquant, bien que la façon dont les sections de cordes communiquaient entre elles était réjouissante. L’absence de construction en grands arcs privait l’oeuvre du sentiment d’inéluctabilité nécessaire pour en faire une interprétation mémorable. S’il y a eu métamorphose, c’était pour le pire : les superbes instrumentistes à cordes de l’OSM ont démontré en tellement d’occasions toute la cohésion et la maîtrise du détail dont ils et elles sont capables qu’il est décevant de devoir, comme Roxane dans Cyrano, se contenter de brouet quand on espérait des crèmes.

Il ne faut par contre absolument pas laisser cette première partie indifférente diminuer l’élan qui vous portera vers la Maison symphonique pour vivre l’expérience unique de La Voix humaine lors de la deuxième représentation de ce soir!

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Béatrice Cadrin
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