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MOIS DU PIANO | Beethoven 32 : 32 sonates, 16 pianistes, une journée à Sorel-Tracy.

Par Frédéric Cardin le 11 février 2018

L'événement Beethoven 32 se déroulera à la salle Georges-Codling du Marché des Arts Desjardins, à Sorel-Tracy.
L’événement Beethoven 32 se déroulera à la salle Georges-Codling du Marché des Arts Desjardins, à Sorel-Tracy.

Imaginez pouvoir entendre toutes les sonates pour piano de Beethoven en récital dans la même journée. Ce sera possible le 17 février 2018, à Sorel-Tracy, dans le cadre de l’événement Beethoven 32. De 9 h à minuit, 16 pianistes se relaieront pour interpréter les 32 sonates. Une première au Québec.

« C’est Richard qui m’a dit qu’il rêverait de faire ça au Québec. Je lui ai dit « êtes-vous willing? Parce que moi je le suis! Il a dit oui », raconte Rachel Doyon, directrice et fondatrice du Festival-concours de musique classique de Pierre-de Saurel ainsi que de la Maison de la musique de Sorel-Tracy. Beethoven 32 est organisé dans le cadre du 16e anniversaire du Festival-concours de Pierre-De Saurel.

Et Richard, c’est Richard Raymond, pianiste québécois bien connu.

« Je le connais parce qu’il a enseigné à mon fils quand il était au Conservatoire de musique de Montréal et qu’il vient chaque été faire un séjour musical avec ses élèves à la Maison de la musique », ajoute Mme Doyon.

Beethoven 32, qui se déroulera à la salle Georges-Codling du Marché des Arts Desjardins, à Sorel-Tracy, est donc une sorte de défi. Sous toutes réserves, c’est probablement la première fois que cela se fera au Québec.

« J’ai demandé à Georges (Nicholson) s’il se rappelait avoir eu vent d’un événement du genre dans le passé, au Québec. Il a dit non », dit Rachel Doyon.

Un défi, aussi, parce que ça se fera à Sorel-Tracy, une petite ville située à l’extrême Est de la vaste région du Montréal métropolitain. Une ville que l’on n’associe pas spontanément à la musique classique, mais qui peut revendiquer un solide bagage artistique musical, avec, entre autres, les familles Codling, Laforest, Liessens, ainsi que l’Harmonie Calixa-Lavallée, qui existe depuis 1916. Et puis, depuis le début des années 2000, grâce à Mme Doyon, sa passion, et la participation de la communauté soreloise, cette ville semble être sur le point de s’épanouir comme jamais dans le domaine.

Beethoven 32 : la fête

Beethoven 32, c’est 16 pianistes, dont Richard Raymond, Jean-Philippe Sylvestre, Anne-Marie Dubois, Frédéric Chiu, Xiaoyu Liu (ex-Révélation Radio-Canada classique), Guillaume Martineau (Révélation Radio-Canada jazz, mais de formation classique), Serhiy Salov et Mari Kodama, pianiste de renom et conjointe de Kent Nagano, qui a enregistré une intégrale saluée très positivement des 32 sonates de Beethoven, sous étiquette Pentatone.

 

 

« C’est un événement qui coûte cher, mais nous avons trouvé des partenaires enthousiastes dans la région, dit Rachel Doyon. D’ailleurs, la communauté de Sorel-Tracy, tant les élus que les citoyens, nous soutient de façon fantastique! »

L’un de ces partenaires est le Groupe Canimex, grâce à qui les étudiants en piano auront droit à des billets gratuits!

Inutile de dire qu’un événement comme celui-ci, tenu en dehors des grands centres offre une chance unique de rayonnement tant à la musique classique qu’à la région soreloise elle-même, et à ses organisateurs. Et ce n’est tout de même pas si loin : Sorel est à 50 minutes du centre-ville de Montréal. Les Montréalais pourront donc s’y rendre aisément, d’autant plus qu’un système d’autobus régulier et efficace existe entre les deux.

« Ça fait longtemps que je veux trouver une idée qui permettra à notre Maison de la musique de s‘imposer dans le paysage musical. Je rêve que ce que nous faisons soit mieux connu. Ce genre de projet a le potentiel de faire parler de lui, et de nous, au niveau national. La preuve, vous êtes là! Et puis, j’aimerais bien que l’on remporte un Prix Opus un jour. Beethoven 32 a le potentiel de nous le permettre ».

Pour Richard Raymond, co-initiateur du projet, il s’agit de l’un des événements marquants de l’année musicale, certainement.

Qui plus est, la formule proposée est simple et offre beaucoup de flexibilité. Un passeport pour la journée complète est disponible, à 60 $. On peut aussi acheter des billets par blocs (4 différents), pour 25$ chacun. Vous pouvez ainsi choisir les sonates ou les pianistes qui vous intéressent le plus.

En jetant un coup d’œil sur la programmation, je note quelques moments forts en perspective : la Moonlight et l’op. 111 par Richard Raymond, la Pastorale par Frédéric Chiu, l’Appassionata par Guillaume Martineau, la Tempête par Marika Bournaki, et l’immense Hammerklavier par Mari Kodama.

Beethoven 32 aura lieu à la toute nouvelle salle Georges-Codling du Marché des Arts Desjardins, inaugurée le 30 novembre dernier et située dans le Vieux-Sorel, au-dessus du Marché Richelieu, un bel édifice patrimonial art déco de 1930 qui ressemble au Marché Atwater. La salle, qui existait avant cette inauguration, a subi des rénovations majeures qui en font désormais un lieu de diffusion élevé aux standards acoustiques modernes.

La Maison de la musique

Pendant que j’étais sur place, Rachel Doyon m’a fait faire un tour du propriétaire de la très belle Maison de la musique de Sorel-Tracy.

 

Il s’agit d’une maison ancestrale bâtie en 1909. Elle a été achetée par Mme Doyon et ses partenaires en 2011 et transformée (magnifiquement, il faut le souligner) en espace de récitals d’environ 60 places (modulable jusqu’à 80, très intimiste donc), chambres, studios de répétitions pour musiciens en résidence, douches, cuisine, etc.

« On y donne des cours d’éveil musical pour les touts petits. Nous voulons bâtir une relève pour la musique classique. L’été, nous offrons des camps musicaux et nous offrirons bientôt des résidences d’artistes, un rêve que je caressais depuis longtemps, en partenariat avec le Conseil québécois de la musique et le Conseil des arts et lettres du Québec ».

Une Maison soutenue activement par la communauté, soutient Mme Doyon.

« Dès le départ, le Mouvement Desjardins de la région et la Ville ont été derrière nous, et citoyens également, dont le couple Madeleine et Alain Goulet. Nous avons mis sur pied un groupe nommé La Symphonie des 100. Ce sont des donateurs de la région. La Maison est une entreprise d’économie sociale reconnue, ce qui nous permet d’intégrer un vaste réseau. Nous avons aussi été parmi les premiers en dehors de Montréal ou Québec à nous lier à la SAMS (Société des Arts en Milieu de Santé). »

Ce genre d’aventure dans une petite ville comme Sorel-Tracy reste tout de même une folie, de dire le journaliste.

Elle est d’accord, mais sa passion prend le dessus. C’est important! Et puis, ça fonctionne assez bien, malgré les défis constants.

Rachel Doyon, pourtant, n’en était pas à ses premiers pas dans le domaine de la musique classique au moment de fonder la Maison de la musique. En 2003, elle a fondé et continue de diriger le Festival-concours de musique classique de Pierre-de Saurel, un rendez-vous de plus en plus incontournable dans le circuit national de compétitions musicales.

À la différence de la plupart des compétitions, celle de Sorel-Tracy invite les très jeunes à se présenter.

« Stéphane Tétrault avait 9 ans la première fois qu’il est venu! Charles Richard-Hamelin avait 12 ou 13 ans. Même chose avec Vincent Lauzer! Et ça tisse des liens, vous savez. Ils reviennent souvent par la suite. Même quand ils deviennent professionnels, nous gardons un excellent contact. Pour nous, c’est comme voir nos enfants revenir à la maison. On les a vu grandir! »

C’est un peu le Concours qui a motivé la création de la Maison. Le public souhaitait revoir les artistes plus souvent. Les artistes eux-mêmes voulaient revenir, et avoir un endroit pour se produire plus facilement. On souhaitait offrir aux membres du jury du Concours un endroit accueillant pour les héberger et les nourrir.

La Maison sert désormais de point d’ancrage important au Concours et à la vie musicale classique dans la région.

Générosité exceptionnelle

La Maison, telle qu’elle existe en ce moment, est le résultat d’une campagne de dons exceptionnelle. Des gens d’affaires, des mélomanes, des citoyens ordinaires ont tous et toutes contribué à sa réalisation. Des pianos ont été donnés (dont un piano ancestral de 1876, qui a servi longtemps pour jouer de la musique pendant la projection de films muets au début du 20e siècle! Une pièce de collection, qui n’est cependant pas utilisée pour les cours ou les répétitions), et d’autres, achetés grâce à des prêts à conditions avantageuses. Il y a maintenant 6 pianos (7 avec celui de 1876) dans la Maison : des Yamaha de bonne qualité, 4 droits et 2 à queue. De beaux meubles ancestraux ont également été offerts.

 

La Maison de la musique de Sorel-Tracy. (Photo: toile de l'artiste-peintre Mario Cardin)
La Maison de la musique de Sorel-Tracy. (Photo: toile de l’artiste-peintre Mario Cardin)

La mère d’un enfant inscrit à un cours donné à la Maison a donné son ensemble de salon. Un vitrail et de très jolies illustrations habillant les murs ont été réalisés grâce à des artistes généreux. C’est comme une histoire d’amour entre une région et la beauté de l’art et de la musique, représentée par un lieu emblématique.

La Dragonne de la musique classique

La passion de Rachel Doyon est remarquable. Ironiquement, c’est son fils, le pianiste Antoine Laporte, qui lui a communiqué cet amour du classique.

« Avant, je n’aimais pas ça. Pantoute ».

On sait que les parents poussent leurs enfants à faire de la musique, puis à aimer cela. Mais le contraire existe aussi, apparemment!

Dans le cas de Mme Doyon, le résultat est spectaculaire!

Elle a des idées à la pelletée qui se bousculent dans la tête.

Poursuivre la tradition des soupers avec les Dragons de Radio-Canada. Des repas intimes dans la maison, avec les Dragons et pour les gens d’affaires de la région.  « Ils viennent tous. François Lambert a été particulièrement impressionné. Mme Henkel aussi. Serge Beauchemin reviendra le 17 mai prochain. Au coût de 250$, c’est une façon abordable, en plus d’être agréable, de rencontrer des mentors d’affaires. Nous engageons de jeunes musiciens pour animer la soirée, ce qui permet à eux aussi de profiter de l’expertise entrepreneuriale des Dragons. C’est important de nos jours pour les jeunes artistes de développer leur sens des affaires. Ça leur manque un peu parfois »

Elle va participer à la création d’un réseau de salons de musique. Partout à travers le Québec, de petits espaces de diffusion s’uniront afin de pouvoir engager des musiciens classiques et jazz ainsi que des auteurs-compositeurs-interprètes francophones qui profiteront du réseau pour pouvoir tourner. Chaque petit « salon » profitera, en retour, de la force du réseau pour pouvoir offrir une programmation plus généreuse et prestigieuse.

Et pourquoi pas un orchestre symphonique?

Mais l’idée la plus téméraire de Mme Doyon, c’est sans doute celle de la création d’un orchestre symphonique à Sorel-Tracy d’ici 10 ans!

« Ça j’y pense très fort! Et pourquoi pas? La région mérite de rayonner. Nous sommes en train de bâtir une relève, avec des cordes et des vents, en collaboration avec d’autres gens passionnés de la région comme Marie-Renée Sheridan, enseignante et bassoniste, et d’autres professeurs.  La prochaine étape, ne serait-ce pas de leur offrir un écrin collectif pour s’exprimer? Moi, je le veux! »

Pendant l’heure et demie que j’ai passée en compagnie de cette femme, une évidence s’est imposée : s’il y a une personne qui peut le faire, c’est elle!

Rachel Doyon a été directrice de la chambre de commerce de Sorel-Tracy pendant 12 ans, elle peut donc profiter d’un large réseau de gens d’affaire et de politiciens. Moi qui suis originaire de Sorel-Tracy, j’en ressens comme une fierté, et un espoir.

Et puis il y a l’essentiel : une combinaison passion et de détermination telle que j’en ai rarement rencontré, combinaison dont Rachel Doyon se sert habilement pour enrichir le terreau de la musique classique, quelque part à l’extrémité Est de l’autoroute 30.

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