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ENTRETIEN | Jacques Lacombe, un rendez-vous russe avec l'OSM

Par Frédéric Cardin le 31 janvier 2018

Jacques Lacombe dirige l'OSM les 7 et 8 février dans le programme L'Âme russe. (Photo: courtoisie)
Jacques Lacombe dirige l’OSM les 7 et 8 février dans le programme L’Âme russe. (Photo: courtoisie)

Le chef d’orchestre Jacques Lacombe revient diriger l’Orchestre symphonique de Montréal (OSM) les 7 et 8 février prochains dans un programme intitulé L’âme russe. Nous en avons profité pour lui demander de nous parler de cette musique, ainsi que de sa carrière, qui va assez bien par les temps qui courent!

À l’occasion de ce concert, on entendra le Concerto pour violon no 2 en do dièse mineur, op. 129 de Dmitri Chostakovich (avec la soliste Alina Ibragimova), et la Symphonie no 5 en si bémol majeur, op. 100, de Prokofiev.

Q- Jacques Lacombe, à quoi le public doit-il s’attendre en écoutant la 5e symphonie de Prokofiev?

R- C’est une œuvre assez flamboyante, composée en 1945 et qui porte donc les traces d’influences héritées de la Seconde Guerre mondiale. Une œuvre avec des côtés sombres, donc, mais qui contient également des passages festifs. Prokofiev souhaitait avant tout célébrer la grandeur humaine, et non sa laideur. Il y a des moments de désespoir, certes, mais aussi de la folie, de l’exubérance. La symphonie dans son ensemble est haute en couleurs.

La partition sollicite énormément toutes les sections instrumentales. C’est presque un concerto pour orchestre.

Pour ceux et celles qui ne connaissent pas ce chef-d’œuvre encore, je dirais qu’on s’y retrouve dans un univers sonore assez près de celui du ballet Roméo et Juliette, de Prokofiev également, bien mieux connu.

Q-Le concert porte le titre de Jacques Lacombe et l’âme russe. Qu’est-ce que l’âme russe pour vous?

R-C’est très difficile de mettre une étiquette sur un peuple et une culture, mais disons que de manière générale, je perçois l’âme et la culture russes comme un univers d’extrêmes. Quand c’est triste, c’est ben triste, et quand c’est joyeux, c’est ben joyeux, comme on dirait en Québécois!

Au-delà de cette simplification, la musique russe du 20e siècle est fascinante à bien des égards : c’est un mariage unique entre la culture germanique (un peu) et l’école française (beaucoup). L’orchestre de Prokofiev doit beaucoup à Debussy et à Ravel.

Succession de Kent Nagano

Q-Après l’annonce du départ de Kent Nagano en 2020, abordez-vous ces concerts comme une audition pour l’éventualité d’un poste à la tête de l’orchestre?

R- Non, ce serait ridicule. L’OSM et moi, on se connaît tellement et on a fait tellement de répertoires ensemble. Nous sommes déjà intimes. Qui plus est, c’est déjà assez difficile de faire de la belle et bonne musique sans ajouter des éléments inconnus et stressants. Je sais que nous avons fait une Symphonie fantastique de Berlioz ensemble il y a deux ans, et ce avec beaucoup de plaisir de part et d’autre. J’ai très hâte de les retrouver, sans autre considération.

Q- Cela dit, vous avez récemment déclaré ne pas fermer la porte à cette éventualité. À supposer qu’on vous appelle pour vous offrir le poste, et que vous acceptez, quelle direction artistique rêveriez-vous de faire prendre à cet orchestre?

R- Pour être bien honnête, je suis tellement occupé à construire mes nouvelles saisons avec mon nouvel orchestre, « l’autre OSM » (Orchestre symphonique de Mulhouse) que je n’ai sincèrement pas pris un seul instant pour me pencher sur le sujet!

L’autre OSM

Q- Parlons de l’Orchestre de Mulhouse. Vous venez d’être nommé à sa tête à compter de la saison 2018-2019. Quelle place tient cet ensemble dans le paysage symphonique français?

R- C’est l’un des 4 orchestres importants de l’est de la France, avec Strasbourg, Nancy et Metz. C’est un orchestre à statut régional. Il doit donc faire des tournées dans toute la région desservie administrativement par Mulhouse. C’est l’équivalent de l’Orchestre métropolitain de Montréal qui doit faire des tournées dans l’ensemble de l’île de Montréal. Il y a donc un volet démocratique à l’institution qui est très intéressant. Et puis, l’orchestre passe aussi le tiers de son temps à jouer à l’Opéra national du Rhin et au ballet.

 

Jacques Lacombe dirige l'OSM les 7 et 8 février dans le programme L'Âme russe. (Photo: courtoisie)
Jacques Lacombe dirige l’OSM les 7 et 8 février dans le programme L’Âme russe. (Photo: courtoisie)

Q- Que souhaitez-vous faire avec cet orchestre?

R- Je suis encore en train de travailler à la programmation et d’étudier l’histoire de l’orchestre, pour bien m’imprégner de sa personnalité. Mais disons que j’aimerais faire du répertoire français avec eux, ce qui, curieusement, n’est pas tellement ancré dans les habitudes des orchestres français en général!

J’aimerais également introduire là-bas le principe des concerts commentés. On le fait de plus en plus souvent en Amérique, mais en Europe, cela demeure assez rare. Et pourtant, je sens qu’il y a une demande pour ça.

Et puis j’aimerais aussi tisser des liens plus étroits avec les intervenants culturels du milieu, comme ceux issus de la danse, du théâtre, des arts plastiques, etc. Je l’ai fait au New Jersey, et c’est extrêmement stimulant.

David contre Goliath

Q- L’Orchestre du New Jersey! Justement, après 8 ans à sa tête, vous avez annoncé votre départ récemment. Quel bilan faites-vous de votre passage là-bas?

R- Je suis très satisfait du boulot accompli. Nous avons fait un important travail de fond, comme le renouvellement d’une partie des effectifs de l’orchestre. Et puis, nous avons remporté un prix pour l’originalité de notre programmation, entre autres grâce au Concerto de Busoni que nous avons joué au Carnegie Hall avec Marc-André Hamelin. Ce fut une expérience formatrice et enrichissante.

Q- Il doit être difficile de se démarquer face à ce voisin pourvu de moyens gigantesques et d’une immense notoriété, celui de New York? Comment s’impose-t-on?

R- Oh là là, c’est un défi constant! Il faut bien entendu s’assurer de la qualité du produit offert. C’est la base. Et puis, comme je l’ai dit, il faut tenter de proposer une programmation originale, à la fois avec des œuvres surprenantes, mais aussi des solistes qui sortent du lot.

Nous avons créé des partenariats étroits avec des galeries d’art, des compagnies de danse et de théâtre, ainsi qu’avec le milieu des affaires, de l’État.

Il faut être à l’écoute de la communauté, et cela m’a permis de devenir un artiste plus complet, en fin de compte.

Il y aussi un autre défi avec cet orchestre : comme pour Mulhouse, il a une vocation régionale. Et au New Jersey, cela signifie qu’il faut visiter des communautés assez disparates et ça suppose des défis de programmation intéressants. En effet, comment s’adresser efficacement à des publics aussi différents que ceux d’Englewood d’un côté, de type banlieue et plus âgé, et de Princeton d l’autre, beaucoup plus jeune et universitaire?

Avec l’OSTR pour toujours?

Q- Votre carrière va donc plutôt bien. Qu’est-ce qui vous satisfait le plus en ce moment?

R- La possibilité de faire de l’orchestre pur et de l’opéra (depuis 2016-2017, je dirige l’Opéra de Bonn). Je suis très heureux de ne pas être étroitement catégorisé dans un seul type de répertoire.

Q- Pourriez-vous choisir entre l’opéra et l’orchestre?

 

« Non, absolument pas. L’idéal pour moi est une proportion à 50-50! Mon travail de symphoniste me permet de travailler les détails plus en profondeur à l’opéra, et à l’inverse, la direction d’opéras m’amène à aborder les lignes instrumentales comme si je devais les chanter. L’un nourrit l’autre. » – Jacques Lacombe

 

Q- Vous êtes organiste. Cela vous démange-t-il de taquiner le Grand Orgue Pierre-Béique de la Maison symphonique?

R- Ha ha ha! Je dois avouer ne pas avoir pris le temps de l’explorer encore. Mais je me considère plutôt comme un organiste à la retraite maintenant! Je n’aurais tout simplement pas le temps de me remettre suffisamment en forme pour en jouer convenablement. Mais diriger une œuvre incluant l’orgue? Ah, ça pourrait être très intéressant!

Q- Vous aimeriez créer à nouveau des œuvres originales québécoises comme les Lettres de Madame Roy à sa fille?

R- Les idées, vous savez, ce n’est pas ça qui manque dans la tête d’un chef d’orchestre!! Ce sont des projets qui prennent beaucoup de temps à mettre en place, et c’est ça qui est le plus difficile. Mais qui sait? Cela dit, le 10 février, tout juste après mon passage avec l’OSM, je dirigerai l’Orchestre symphonique de Trois-Rivières dans une version remaniée de Roméo et Juliette avec les étudiants du département de théâtre du Cégep de Trois-Rivières et des stagiaires du Conservatoire de musique de Trois-Rivières.

On y juxtaposera des extraits de la pièce de Shakespeare avec la musique du ballet de Prokofiev. Alors oui, quand l’occasion se présente, je suis toujours partant pour embarquer dans des projets créatifs!

Q- Vous et l’OSTR, c’est pour la vie?

J’espère pouvoir continuer longtemps, oui. J’ai une complicité très forte avec ces musiciens. Je suis fier de l’évolution de l’orchestre. L’épanouissement de la qualité générale est impressionnant. Dans la mesure où l’orchestre aura accès aux outils dont il a besoin pour poursuivre son ascension qualitative, j’y resterai.

Jacques Lacombe, c’est un bonheur de vous revoir et nous avons très hâte de vous retrouver devant nos orchestres québécois!

Merci à vous. C’est toujours un plaisir de revenir à Montréal!

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