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Beethoven par Blomstedt, ou le secret de l’éternelle jeunesse

Par Dominique Joucken le 10 septembre 2017

Le chef suédois Herbert Blomstedt souffle ses 90 bougies cette année 2017. En guise de cadeau, sa nouvelle firme de disque lui a offert la possibilité de réenregistrer un cycle complet des symphonies de Beethoven, à la tête de l’orchestre de Leipzig dont il fut le directeur musical de 1996 à 2005. Accentus a mis les petits plats dans les grands, en termes de présentation, de travail éditorial, de prise de son et même de marketing.  L’objet relève du grand luxe, mais tout cela n’est encore rien comparé au contenu.

Que celui qui espère une vision sage, apaisée, marmoréenne, typique des chefs parvenus au crépuscule de leur carrière, passe son chemin. Le Beethoven de Blomstedt est allègre, bondissant, tonique et juvénile. D’abord dans le choix des tempi, presque exactement ceux voulus par Beethoven notamment dans une Huitième prise à un train d’enfer, sans la moindre anicroche. Mais la fougue d’une musique n’est pas qu’une question de vitesse, c’est toute une manière de phraser, de rebondir, d’animer le discours. Loin du Beethoven précurseur de Wagner joué avec génie par Furtwängler, Barenboim ou … Blomstedt lui-même dans son intégrale précédente, tout ici respire la transparence et la légèreté héritée de Haydn et de Mozart. Une légèreté qui ne rime pas avec superficialité, tant l’orchestre garde des réserves de puissance qui peuvent rendre au propos toute sa densité, sans une once de lourdeur.

Le début de la Quatrième est un cas d’école : alors que la plupart de ses collègues jouent sur un ralentissement maximal au début de l’ « Adagio », créant la tension par l’absence de résolution des dissonances, le chef suédois file droit, sur un tempo régulier, confiant dans la seule force du texte pour créer cet effet d’ « origine du monde » qu’évoquait John Eliot Gardiner dans un récent entretien médiatique, avant de déboucher sur un « Allegro vivace » dont la joie bondissante emporte tout sur son passage. Toute la grammaire beethovénienne est résumée dans ces 11 minutes, qui s’écoutent le cœur battant, les oreilles qui surchauffent.

Équilibre

On pourrait aussi détailler sans fin les félicités offertes par l’orchestre de Leipzig, qui retrouve avec un plaisir évident son ancien patron. Le miracle d’équilibre entre la noblesse des sonorités, les graves bien assis, et la parfaite lisibilité des plans montrent un travail de fond entrepris avec une patience dont peu d’orchestres permanents sont capables. Le résultat cumule les avantages des formations symphoniques modernes, avec une virtuosité et un liant jamais pris en défaut, et la saveur fruitée des ensembles baroques, notamment grâce à un équilibre cordes/vents/percussions entièrement repensé. Tout cela est rendu possible par une équipe d’ingénieurs qui est consciente du projet artistique et qui s’emploie à faire concorder vision du chef et rendu sonore.

Le Beethoven de Blomstedt est allègre, bondissant, tonique et juvénile … Le miracle d’équilibre entre la noblesse des sonorités, les graves bien assis, et la parfaite lisibilité des plans montrent un travail de fond entrepris avec une patience dont peu d’orchestres permanents sont capables.

Quelques bémols

Au milieu de ce concert de louanges, on se permettra d’émettre deux minimes réserves. La Septième est la seule à décevoir un peu, la rigueur implacable de Blomstedt empêchant parfois de s’attarder dans certains recoins de la partition. Et, dans la Neuvième, le ténor Christian Elsner jure avec une voix chevrotante et mal assurée, surtout qu’il est entouré de partenaires de grand luxe, notamment un Christian Gerhaher qui fait sonner son récitatif avec art de diseur incomparable. Deux minuscules bémols qui n’empêchent pas cette nouvelle intégrale de monter sur les plus hautes marches du podium.

De 1835 à 1848, c’est un tout jeune homme appelé Félix Mendelssohn qui occupa le poste de chef à Leipzig. Tous les commentateurs de l’époque (jusqu’à Wagner !) louaient son Beethoven aérien, lumineux, apollinien. Celui qui le fait revivre aujourd’hui est un quasi centenaire. Preuve que, en musique, les miracles sont possibles et les étiquettes dénuées de signification. Bon anniversaire, Maestro, et merci !

Beethoven : Symphonies

Orchestre du Gewandhaus de Leipzig

Herbert Blomstedt

5 CD ACCENTUS ACC80322

Dominique Joucken

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