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CRITIQUE | L'OSM à Bruxelles : un crescendo vers le sublime

Par Dominique Joucken le 21 mars 2019

 

L'OSM au Palais des beaux-arts de Bruxelles, 20 mars 2019. (Photo: Jean-Marc Abela)
L’OSM au Palais des beaux-arts de Bruxelles, 20 mars 2019. (Photo: Jean-Marc Abela)

Après Paris, Bruxelles. L’OSM était de passage, hier soir, dans la capitale de l’Europe et de la Belgique. Un de nos collaborateurs était présent au Palais des beaux-arts. 

De mémoire de mélomane belge, on n’avait plus vu l’OSM dans notre petit royaume depuis très longtemps. Lorsque la phalange nord-américaine arrive, avec un programme brillant et précédée d’une série d’enregistrements qui, s’ils remontent pour beaucoup à l’ère Dutoit, n’en ont pas moins marqué, les attentes sont élevées.

Après pas mal de retard, et un discours de présentation qui aurait gagné à être raccourci, Kent Nagano fait enfin son entrée sur scène. La tension est maximale, d’autant que la salle du Palais des Beaux-Arts est bondée comme rarement.

Malheureusement, La Damnation de Faust de Berlioz déçoit. Un menuet éteint, comme récité par des instrumentistes fatigués, une danse des Sylphes certes finement colorée, mais vide de substance, et une marche hongroise qui se traîne, avec des cuivres tonitruants et un cymbalier distrait : le bilan n’est guère réjouissant, et on s’apprête à ranger le concert au rayon des occasions manquées.

C’est alors que Marie-Nicole Lemieux fait son entrée, d’un pas résolu, pour interpréter les Wesendonck-Lieder de Wagner. La contralto canadienne dispose d’un fort capital de sympathie auprès du public belge depuis sa victoire au concours musical reine Elisabeth en 2000.

 

Marie-Nicole Lemieux
« Inspirés par la voix chaude de Lemieux et sa façon d’habiter ce qu’elle chante, les instrumentistes et le chef se ressaisissent, offrant un écrin ou les détails rivalisent de finesse. » (PHOTO: Jean-Marc Abela)

Par la force de son inspiration, par sa capacité à alterner introversion et extraversion, par sa gestion de la puissance, par la perfection de sa diction, par sa musicalité hors pair, la chanteuse va mener le concert sur des cimes qu’il ne quittera plus. C’est que le génie de la contralto semble contagieux. Oublié, le Berlioz hésitant du début.

Inspirés par la voix chaude de Lemieux et sa façon d’habiter ce qu’elle chante, les instrumentistes et le chef se ressaisissent, offrant un écrin ou les détails rivalisent de finesse. Rarement aura-t-on entendu un accompagnement de lieder aussi subtil, parsemé de plaisirs à se pâmer.

L’attention du public, au départ très flottante, se fixe, et les toux se font moins nombreuses au fur et à mesure que la chanteuse et l’orchestre progressent dans ce bouleversant cycle de l’amour condamné. Les derniers accords de Traume s’éteignent dans un silence chargé d’émotion.

Dans le trop rare Jeux, le poème dansé de Debussy, l’orchestre confirme son adéquation au répertoire français qui a tant fait pour sa gloire : toute la grammaire de l’impressionnisme musical est convoquée et exposée avec maestria.

Lumière des bois, tremolos des cordes, brèves et essentielles interventions des cuivres, richesse des percussions utilisées non pour faire du bruit mais pour enrichir la palette du compositeur … Les montréalais s’en donnent à coeur joie, tout à l’ivresse de chanter dans leur arbre généalogique.

Mais l’OSM a plus d’une corde à son arc, et il ne se contente pas d’exceller dans les pièces délicates ou les camaïeux de nuances. Le Petrouchka de Stravinsky réclame en effet d’autres qualités : du mordant, de l’âpreté, une capacité à affronter les angles et les ruptures d’une musique qui est l’équivalent sonore du cubisme.

On est stupéfait par la facilité avec laquelle la baguette de Nagano passe d’un monde à l’autre, avec la même conviction, la même précision, la même flamme. L’orchestre suit au quart de tour, n’offrant plus le moindre signe de fatigue dans une partition pourtant longue et redoutable.

Certains instrumentistes se couvrent de gloire : on n’est pas près d’oublier la trompette solo ou le tuba. Face aux incessants rappels du public, Nagano propose en bis une Valse de Ravel aérienne et féline, qui n’aura jamais été aussi proche de ses modèles viennois, avec ce qu’il faut de cauchemar a la fin. La salle est hors d’elle.

Dans les couloirs, la question qui était sur toutes les lèvres : « Quand reviendront-ils ? »

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