Dimanche après-midi dernier, les amateur·e·s de l’ensemble vocal Tallis Scholars ont rempli la Salle Bourgie pour entendre un programme portant un titre approprié pour le temps de l’année, In dulci jubilo. Les dix membres, toujours dirigés par leur chef fondateur Peter Phillips, ont interprété des œuvres de la Renaissance, leur répertoire de prédilection, mais également deux pièces du compositeur estonien Arvo Pärt.
La réussite durable de l’ensemble fondé en 1973 repose sur sa sonorité caractéristique, résultat d’un équilibre parfait des parties, d’un fondu sublime et d’une symbiose complètement organique (cette dernière servant mieux les chanteurs·euses que la direction plutôt cryptique du chef). Apparents dans les œuvres interprétées en tutti, ces éléments atteignaient un summum absolu dans les œuvres de Hildegard von Bingen chantées avec une maîtrise renversante par le seul quatuor de sopranos unies dans un unisson impeccable.
L’autre moment marquant a été le Salve Regina de Tomas Luis de Victoria, dont les incantations planantes flottaient comme désincarnées dans l’espace de la Salle Bourgie.
Ce Salve Regina était un de quatre au programme : le premier, une mise en musique de Jacob Obrecht, a laissé une impression plutôt sévère. En deuxième partie, l’alto Elisabeth Paul s’est avancée seule devant le groupe pour présenter une monodie anonyme, suivie d’une version à cinq voix de Hernando Franco.
Stylistiquement, les œuvres de Pärt s’intègrent bien au programme dominé par la musique ancienne et sont bien servies par les sons blancs et éthérés des Tallis Scholars. Dès le début du Magnificat présenté en première partie, l’unisson se divisant pour devenir une seconde mineure annonce le langage musical plus moderne, alors que le Da Pacem, Domine s’appuie sur des effets « tintinnabulisants » typiques de Pärt.
L’apposition du titre In dulci jubilo à ce programme était justifiée par l’inclusion de la mélodie médiévale et de la version de Praetorius en ouverture de concert, et de la version multilingue de Robert Lucas Pearsall en clôture. Dans l’ensemble, la jubilation annoncée avait un caractère austère peu associé avec la fête de Noël, cette austérité se manifestant jusque dans la longueur du concert : une première partie de 35 minutes en incluant les applaudissements, sollicités après chaque pièce par l’ensemble prêt à saluer, c’est quand même peu.
N’empêche, entendre les Tallis Scholars en concert, c’est entrer en communion avec le plus haut niveau d’accomplissement musical. La perfection ne dure jamais bien longtemps en ce bas monde, de toute façon.
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