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ENTRETIEN | Un concert pour les 100 ans d'Astor Piazzolla

Par Caroline Rodgers le 11 mars 2021

Il y a 100 ans aujourd’hui, le 11 mars 1921, naissait le compositeur argentin Astor Piazzolla. Pour souligner ce centenaire, I Musici de Montréal présentera le concert ¡Feliz cumpleaños, Astor! en webdiffusion du 19 au 26 mars sous la direction de Nicolas Ellis. Nous avons interrogé Jonathan Goldman, bandonéoniste, musicologue, soliste invité du concert et grand connaisseur de l’œuvre d’Astor Piazzolla.

LvM: Parlez-nous de votre parcours professionnel et musical

Jonathan Goldman: « Je suis né à Toronto et j’ai commencé le piano à cinq ans. J’ai suivi le cursus du piano au Conservatoire royal de musique de Toronto. Je suis musicologue et professeur de musicologie à la Faculté de musique de l’Université de Montréal. Parallèlement à ces activités, je maintiens un profil de concertiste et mon instrument, le bandonéon, est emblématique du tango argentin. Il faut savoir, toutefois, que comme musicologue, je me suis intéressé surtout à la musique du XXe siècle, en particulier à l’avant-garde. J’ai été rédacteur en chef de la revue Circuit pendant dix ans, et j’ai écrit un livre sur Pierre Boulez. Depuis longtemps, le tango est ma pratique musicale, mais peut-être à dessein, je n’y touche pas d’un point de vue musicologique, même si Astor Piazzolla a sa place dans l’histoire de la création musicale au XXe siècle. »

LvM: comment en êtes-vous venu à jouer du bandonéon

Jonathan Goldman: « C’est venu à l’âge adulte, en passant par l’accordéon avec un accordéoniste extraordinaire, qui vient de Roumanie, Marin Nasturica. Je me suis mis au bandonéon, que j’ai appris en autodidacte. Maintenant, c’est le seul instrument sur lequel je me produits en concert. Je joue encore du piano pour le plaisir, mais pas en public. »

LvM: êtes-vous déjà allé en Argentine? 

Jonathan Goldman: « Oui, je suis allé deux fois, en 2010 et 2011. Les deux fois, j’en ai profité pour faire entretenir et accorder mon instrument par un luthier, là-bas, prendre des cours avec différents maîtres de l’instrument, et bien sûr, aller à des concerts. Mon instrument a été fabriqué en Allemagne, il a été fait dans le même atelier que les instruments qu’avait Astor Piazzolla. C’est un Alfred Arnold « doble A » qui date de 1938. C’est un instrument fragile et assez capricieux, sensible à l’humidité. Piazzolla a d’ailleurs composé une pièce qui commence par une longue cadence qui s’intitule Tristeza de un doble A. »

 

Astor Piazzolla. (Photo: domaine public)
Astor Piazzolla. (Photo: domaine public)

Astor Piazzolla et le tango nuevo

LvM: parlez-nous de l’apport de Piazzolla au tango et plus largement, à la musique. 

Jonathan Goldman: « Évidemment, le tango existait bien avant la naissance de Piazzolla, et a connu une évolution constante. Parmi les moments importants de son développement, il a eu l’arrivée du bandonéon, un instrument immigrant arrivé dans la région de Rio de la Plata, en Argentin et en Uruguay. Auparavant, le tango était joué sur des instruments comme la flûte et la guitare. Le bandoneon arrive de l’Allemagne à la fin du XIXe siècle et s’intègre au tango au point d’en devenir l’instrument emblématique. Cela a profondément changé cette musique.

L’autre développement important, c’est l’émergence, entre les deux guerres, des orquestas tipicas, d’une douzaine d’instrumentiste, qui comptaient au moins quatre bandonéons et quatre violons, et qui étaient conçus pour animer les bals de tango, que l’on appelait les milongas. C’est important parce que c’est une musique qui nécessite des arrangements très élaborés et cet art s’est développé à partir de ce moment. Astor Piazzolla a fait partie de cette culture et joué dans l’orquesta tipica de son mentor, en quelque sorte, le bandonéoniste Anibal Troilo, et il a signé des arrangements dans sa jeunesse, pour cet orchestre.

La particularité de Piazzolla, c’est qu’il avait l’ambition d’écrire une musique de concert, une musique d’art faite pour être écoutée, plus que pour danser. J’ai écouté récemment un entretien qu’il a donné vers la fin de sa vie et il expliquait qu’il était très important pour lui de jouer dans des salles de concert. La musique qu’il composait visait un public attentif de musique classique. Il avait une formation de musicien classique, il avait étudié auprès d’Alberto Ginastera, et plus tard, il est allé en France pour étudier avec Nadia Boulanger, comme tant que compositeurs de son époque.

Piazzolla voulait faire une sorte d’hybride ou de fusion entre la musique de concert et le tango. Il y a des éléments dans sa musique qui sont typiques du tango, mais d’autres éléments qui ne le sont pas du tout et qui sont vraiment le propre de Piazzolla. Il ne faut pas déduire ce qu’est le tango en écoutant seulement Piazzolla, car il a son langage propre. Il a aussi été influencé par la musique de film, et il a composé plusieurs trames sonores de film. Parfois, il y a aussi un côté néo-baroque dans sa musique, qui fait un clin d’œil à la musique de Jean-Sébastien Bach. Un bon exemple est une fugue de Piazzolla intitulée Calambre, que j’ai enregistrée avec  Quartango. »

 

Note: les musiciens entendus sur cet extrait sont Antoine Bareil (violon) Jonathan Goldman, (bandonéon) Stéphane Aubin (piano) René Gosselin (contrebasse)

Five Tango Sensations

Jonathan Goldman: « Dans le concert que nous allons donner, avec I Musici, deux des pièces présentées sont en forme de fugue: La Muerte del angel, et le dernier mouvement de Five Tango Sensations, qui s’appelle Fear. Cette pièce en cinq mouvements, qui dure trente minutes, est très rarement jouée et n’est pas parmi les plus connues d’Astor Piazzolla. Five Tango Sensations est une œuvre que Piazzolla a réalisée en collaboration avec le Kronos Quartet. C’est une pièce qui a été composée pour eux, pour bandonéon et quatuor à cordes, mais son éditeur a également publié une version pour bandonéon et orchestre à cordes, que nous allons jouer. C’est vraiment une œuvre tardive, de la fin de sa vie, et l’enregistrement qu’il a réalisé avec Kronos a été son dernier en studio. »

On pourra entendre Jonathan Goldman et I Musici dans le programme ¡Feliz cumpleaños, Astor! un concert sous la direction de Nicolas Ellis capté à l’église St.Jax, en webdiffusion du 19 au 26 mars 2021. DÉTAILS DU PROGRAMME ET BILLETS 

Pour connaître les autres concerts des membres de Ludwig van Montréal, lisez chaque lundi notre chronique Choix de la rédaction ou consultez notre calendrier d’événements. 

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