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CRITIQUE | Orchestre Métropolitain : Joyce DiDonato, Mozart, Bruckner et la loi de Vicks

Par Caroline Rodgers le 18 novembre 2019

Joyce DiDonato acclamée par le public, concert du 17 novembre 2019 avec l'Orchestre Métropolitain et Yannick Nézet-Séguin
Joyce DiDonato reçoit l’acclamation du public à la Maison symphonique, à la veille de son départ en tournée avec l’Orchestre Métropolitain et Yannick Nézet-Séguin. (Photo : François Goupil)

L’Orchestre Métropolitain présentait le concert avant son grand départ pour sa tournée américaine, hier soir à la Maison symphonique. Un programme en deux volets contrastés qui fait ressortir les forces de l’orchestre et augure bien pour le périple chez nos voisin du Sud.

J’avais entendu Joyce DiDonato maintes fois sur disque, je l’avais vue au cinéma sur la scène du Met, mais de l’entendre enfin en personne m’a transportée dans une fébrilité difficile à décrire.

Je suis privilégiée, me disais-je, car je vais revivre ce moment merveilleux quatre fois. Pour cette partie, l’OM est dans une formation classique réduite. Côté son, tout est bien proportionné. Le tout commence par une vigoureuse Ouverture de La Clemenza di Tito, vive et fort bien articulée.

Et puis, vêtue d’une robe écarlate renversante, ELLE entre sur scène.

Joyce DiDonato chante d’abord Parto, Parto, ma tu ben mio, un air tiré de La Clemenza si Tito, de Mozart, qui lui permet de démontrer sa virtuosité de mezzo colorature. Mais c’est tellement plus que cela. C’est l’incarnation parfaite d’un personnage, l’interprétation habitée, la grâce, l’émotion, l’impression d’accéder à tout un monde intérieur avec elle.

Alors que certaines chanteuses donne l’impression de venir d’une autre planète tellement elles sont parfaites (j’avais ce sentiment avec la soprano Lise Davidsen dans Fidelio, il y a quelques semaines), Joyce DiDonato est un autre type d’artiste, profondément humaine comme les sentiments qu’elle exprime à travers son chant.

Chose rare, un soliste participe à cet air d’opéra et prend place à l’avant, de l’autre côté du podium. La clarinette, instrument chéri de Mozart, ajoute une dimension de gravité supplémentaire à la scène. Simon Aldrich, clarinette solo, l’interprète avec justesse et sensibilité.

Le deuxième air, Non più di fiori, sera tout aussi émouvant. On se délecte tellement de cette voix que l’on voudrait qu’elle ne s’arrête jamais. Cette fois, c’est le cor de basset qui ajoute une couleur particulière.

Après une ovation triomphale, la chanteuse revient pour chanter Voi che sapete, l’air célèbre de Cherubino dans Les Noces de Figaro, avec des petites mimiques naïves amusantes.

On ne peut que l’adorer.

Bruckner

La Symphonie no 4 de Bruckner est une oeuvre tellement passionnante que ses 70 minutes passent vite lorsqu’elle est bien jouée. C’est ici le cas, la question ne se pose même pas. Yannick Nézet-Séguin, en pleine possession du texte et de ses idées, la dirige sans partition.

La sonorité de l’orchestre est franche et ample, bois et cuivres se démarquent par leur excellence, et l’acoustique de la Maison symphonique est presque saturée dans les passages fortissimo.

L’orchestre donne l’impression d’être un immense cœur qui palpite au milieu d’une tempête aux dimensions épiques. C’est un Bruckner au grandes phrases avec des arcs qui se soulèvent, des crescendos que le chef pense comme le chemin vers une destination, entraînant les musiciens vers des climax gigantesques sans pour autant perdre le sens du détail.

Quelqu’un m’a dit : « Tu vas à la tournée, mon dieu, ça veut dire que tu vas devoir te taper Bruckner quatre fois de plus! »

Et moi, en sortant, de me dire : tant mieux.

Parenthèse : la loi de Vicks

Parenthèse. S’il y a la loi de Moore, le principe de Peter, la loi de Murphy, et bien d’autres, l’Histoire se souviendra (ou fort probablement pas) que c’est le 17 novembre 2019 qu’une journaliste de Montréal pensa la loi de Vicks, selon laquelle :

 

Quoique l’on dise ou fasse, dans un concert de musique classique, quelqu’un dans la salle toussera toujours à un moment crucial ou sublime d’une oeuvre

 

Ceux qui étaient présents au dernier concert avant le départ en tournée de l’Orchestre Métropolitain, il  y a deux ans, se souviendront du festival de toux entre chaque partie des Nuits d’été de Berlioz, chantées par Marie-Nicole Lemieux, et de l’intervention de Yannick Nézet-Séguin pour y mettre fin. Cet épisode m’avait mise fort mal à l’aise.

C’est pendant le second mouvement, Andante quasi allegretto de la Symphonie no 4 de Bruckner, alors que les cordes et les bois sont au beau milieu de leur longue conversation, que l’interruption se fait. Le chef d’orchestre arrête la musique pour expliquer que quand on tousse, on doit mettre sa main devant sa bouche pour atténuer le bruit.

Environ 20% de la salle applaudit son intervention tandis que 80% demeure tétanisée (on remarquera, ici, une référence à la loi de Pareto pour rester dans le thème). Au fond, comme la tartine beurrée qui tombe du mauvais côté, la loi de Vicks n’est qu’une application de la loi de Murphy. Avec les applaudissements, on entre dans la démonstration d’une autre loi, la LEM, dont je vous laisse lire la définition.

Pour ma part, je mettrai plusieurs minutes à pouvoir me concentrer de nouveau sur la musique, bien que le message soit passé et le silence établi. Le public se « reprendra » (mon voisin de siège affirmant même qu’il s’agit d’une vengeance) toutefois à la fin du mouvement avec un épisode record de bruits divers : toux, tortillements sur son siège, froissements nerveux de programme, chuchotements et ainsi de suite.

Tirez-en les conclusions que vous voulez. Fin de la parenthèse.

 

Orchestre Métropolitain et Yannick Nézet-Séguin sur la scène de la Maison symphonique, avec une banderole "Bonne tournée", 17 novembre 2019 (Photo : François Goupil)
Les voeux du public montréalais accompagnent l’Orchestre Métropolitain pour sa première tournée en sol américain. (Photo : François Goupil)

Conclusion

Le mouvement final se fait spectaculaire, à plein régime, avec des trombones époustouflants avec leur sonorité pleine et fort satisfaisante. Il va sans dire que la section des cors, qui a fort à faire, est aussi à son meilleur tout au long de la symphonie. Bruckner est un compositeur qui va bien à l’OM. On pourrait dire qu’ils étaient faits l’un pour l’autre.

En rappel, ils joueront un extrait du Poème de la compositrice montréalaise Violet Archer (1913-2000) que l’on avait pu entendre au concert inaugural de saison. Une très belle pièce d’une compositrice que l’on s’étonne de ne pas entendre plus souvent dans nos salles de concert.

Et voilà. Chicago nous attend. Il me reste moins d’une heure pour faire mes valises.

Les retardataires du monde entier me comprennent.

LIRE AUSSI :

 

RENCONTRE | Quatre questions à Yannick Nézet-Séguin juste avant la tournée de l’Orchestre Métropolitain

 

 

 

 

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