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ENTRETIEN | Marie-Josée Lord: "Femmes est l'album du mûrissement".

Par Michel Joanny-Furtin le 23 février 2018

Marie-Josée Lord. (Crédit: Éric Myre)
Marie-Josée Lord. (Crédit: Éric Myre)

Marie-Josée Lord lance Femmes, sur ATMA Classique. « Fragile et complexe à la fois, la femme est une créature humaine assez exceptionnelle », écrit-elle dans l’introduction du livret de cet album. « À travers les œuvres choisies, je voulais parler de la femme autour de quatre thèmes : l’amour, la mort, la vieillesse, ainsi que la maternité avec l’air de Suor Angelica », explique la chanteuse en entrevue.

Aida, Violetta (La Traviata), Musetta (La Bohème), Cio-Cio San (Madama Butterfly), Suor Angelica, Chimène (Le Cid), Salomé (Hérodiade) et Thaïs : la soprano Marie-Josée Lord interprète ainsi huit femmes marquées par le destin que leur ont composé successivement Verdi, Puccini, Massenet, auxquels s’ajoute, en rappel, Bernstein (une fille, West Side Story).

« Amante, épouse, mère, femme de tête, les femmes de cet album connaissent leur valeur et utilisent leur caractère pour réaliser leur destinée, ajoute la soprano. Cette approche thématique m’est très personnelle, parce que moi-même, en tant que femme, j’évolue, je change. Il me semble qu’il est important de parler de la destinée des femmes dans un cadre plus moderne. En écoutant l’histoire de ces héroïnes, on se rend vite compte qu’elles ne sont pas si loin de nos réalités. »

« On observe chez les animaux que les mâles sont souvent plus colorés que les femelles, parce qu’ils doivent les séduire pour se reproduire, développe Marie-Josée Lord. Les femelles quant à elles se confondent avec leur environnement afin de protéger leurs petits des prédateurs. Chez les êtres humains, les choses semblent s’inverser. »

La femme devient alors une source d’inspiration. Elle est l’égérie de bien des poètes, peintres et chorégraphes, au point d’en faire une créature complexe, culturellement induite pour complémenter l’autre moitié de l’humanité que sont les hommes.

Les paradoxes de l’âme humaine

« On la dit ensorceleuse, manipulatrice, séductrice, poursuit-elle, mais elle est aussi maternelle, polyvalente, sensible. Je voulais par ce concert aborder avec le public des thèmes de nos vies qui nous sont communs : l’amour, la vie, porter la vie, la mort et la vieillesse. J’ai donc cherché des airs à même de rejoindre le public dans ce sens. »

 

Marie-Josée Lord et l'Orchestre symphonique de Laval, sous la direction d'Alain Trudel. (Crédit: Éric Myre)
Marie-Josée Lord et l’Orchestre symphonique de Laval, sous la direction d’Alain Trudel, pour l’enregistrement de Femmes. (Crédit: Éric Myre)

Selon elle, la place des femmes dans l’art lyrique demeure une question de perception depuis les débuts de l’opéra. « Manipulatrices ? Et les hommes, alors ! On la place toujours dans une situation de séduction et de trahison, victime d’elle-même parce qu’on ne lui laisse, au bout du compte, pas vraiment d’autres choix… »

Avec ce disque, Marie-Josée Lord veut « mettre en valeur la beauté de la femme selon ses multiples facettes et les paradoxes de l’âme humaine » : si Suor Angelica chante la maternité, Musetta aborde la coquetterie et Thaïs, la vieillesse et la perte de la beauté. Mais chacune d’elles, finalement parlent d’amour : l’amour trahi (Madama Butterfly), l’amour naïf, l’amour triangulaire (Aïda) et l’amour maternel (Suor Angelica).

 

ATMA Femmes Verdi, Puccini, Massenet
Femmes, de Marie-Josée Lord, est disponible à compter du 23 février.

Commander son propre avenir

Issu d’un spectacle thématique, ce quatrième album de la soprano a été enregistré en concert avec l’Orchestre symphonique de Laval, sous la direction d’Alain Trudel, le 25 octobre 2017 à l’Église Saint-Rose-de-Lima à Laval.

« Aida n’était pas dans le spectacle, précise la cantatrice, mais je l’ai ajoutée au programme parce qu’elle faisait une belle ouverture en permettant de marquer, d’inscrire cette tragédie dans la thématique de l’album. Ce qui explique aussi pourquoi on n’y trouvera pas des arias de Mozart. »

Peut-être, alors, dans un album Femmes II ? « Pourquoi pas ? », sourit-elle.

Dans ce même état d’esprit, la prise en main de leurs destinées, « « Femmes » est l’album du mûrissement », écrit Marie-Josée Lord dans le texte introductif de l’album, et ajoute : « je vis les plus beaux segments de ma vie. Le passé ne me hante plus, j’habite mon présent et je commande mon avenir. »

Ainsi, prépare-t-elle aussi un livre, non pas de mémoires, mais à l’instar des conférences qu’elle donne, un ouvrage sur son approche personnelle, « comment j’ai apprivoisé ma voix et mon évolution avec cette voix-là et le cœur qui est derrière tout cela… »

« Femmes » de Marie Josée Lord, avec l’Orchestre symphonique de Laval, dirigé par Alain Trudel. ATMA Classique (ACD2 2758)

Cet album fera l’objet d’un concert-lancement, le mardi 27 février à 19 h 30, au Théâtre Maisonneuve dans le cadre du festival Montréal en Lumière. PLUS DE DÉTAILS DANS NOTRE CALENDRIER.

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