La vie parisienne de Jacques Offenbach mise en scène par Alain Gauthier est un moment délicieux et joyeux, très communicatif, qui enchante le public de la salle Claude-Champagne. Toute l’équipe autour de l’Atelier d’opéra de l’Université de Montréal (UdeM) a travaillé fort pour en faire un succès.
La part de chacun ne fut pas une mince affaire afin de mettre en place et coordonner près de 40 chanteurs-comédiens-danseurs en deux distributions et leurs différents costumes, et presque autant de musiciens. Sans compter le chef Jean-François Rivest qui dirige tout ce beau et talentueux petit monde.
Cette production dynamique et pleine de joie est réussie, malgré parfois quelques inégalités dans le jeu et dans le chant, mais rien qui ne gâche le plaisir. On ressent une énergie fortifiante, une envie de jouer, de se faire plaisir et de partager. Les comédiens-chanteurs semblent avoir beaucoup de plaisir à jouer, chanter et danser ensemble et le partagent sans ambages avec le public.
Un feu roulant de musiques et de drôleries
Jean-François Rivest dirige de main de maître cette partition riche et beaucoup moins légère qu’on pourrait le croire. Comme l’explique le chef, « une légèreté paradoxalement très exigeante avec des changements de tempo, d’attitudes, de scènes (…) un exercice pédagogique où l’étudiant apprend à tenir la scène, chanter et parler tour à tour ». La direction est soutenue et rapide – peut-être trop? Il nous a semblé que les chanteurs peinaient à l’occasion à chanter leur texte. La cadence ne faillit pas et même si la représentation dure trois heures avec un entracte, on ne voit pas le temps passer.
Valses, galops, cancans, etc., c’est un feu roulant de rythmes et de musiques et le vaste travail chorégraphique de Noëlle-Émilie Desbiens contribue à cette joie partagée pleine d’humour et de clins d’œil. Une coordination, bien chorégraphiée aussi, des mouvements de décors et des accessoires dans un décor très imagé pour l’époque choisie – 1947- sans excès d’accessoires (et Dieu sait si je suis souvent critique à ce propos…).
Aujourd’hui, les opéras bouffes, par leur légèreté et leur drôlerie, laissent aux metteurs-en-scène une immense liberté imaginative dans la création parce que l’argument n’est qu’un prétexte au divertissement et au plaisir. Ici, cet argument, très alcoolisé au demeurant, est simple : un dandy parisien veut séduire une baronne étrangère en visite à Paris, mais comment éloigner son mari? Stratagèmes de séduction, pièges amoureux et vraies idylles, La vie parisienne se révèle une suite invraisemblable, mais rigoureusement construite et rythmée de chants, de saynètes fantaisistes, de quiproquos, de mises en situation musicales et scéniques pour étoffer l’humour de cette opérette. Au point qu’on pourrait se demander si Offenbach et ses librettistes Meilhac et Halévy n’avaient pas abusé de la dive bouteille en l’écrivant…
Des chanteurs-comédiens de qualité
On y entend un chœur assuré et juste, et de magnifiques duos, chantés (la gantière Pauline et le bottier Fritz) et joués (Gabrielle et le Baron). De cette distribution qu’on retrouvera lors de la représentation de samedi, on retiendra les voix des ténors Emmanuel Hasler (Raoul de Gardefeu) et Emmanuel Raymond (le bottier Frick), des soprani Agnès Ménard (Gabrielle), Mélissa Zerbib (la baronne de Gondremarck) et de la mezzo-soprano Camille Brault (Métella).
La voix juste et posée du ténor Jérémie Chené-Arena (le Brésilien) se coordonnait bien à celles de ses camarades de jeu, mais elle manquait toutefois de puissance hier soir, alors qu’il se remettait d’un vilain rhume. Son jeu dramatique, lui, reste pertinent, dynamique et caricatural à souhait.
Sortent du lot le baryton Dominic Veilleux (le baron de Gondremarck) et la soprano Juliette Tacchino (Pauline), tous deux excellents autant par leur jeu théâtral que par leurs qualités vocales. Ces deux-là semblent bien s’amuser sur scène, et c’est tant mieux!
Une soirée plaisante et drôle à ne pas manquer. Deux représentations, ce soir et demain à 19h30, sont encore à l’affiche de la salle Claude-Champagne. Allez-y, vous ne regretterez pas votre soirée!
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