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Ensemble Scholastica | Saints inouïs
1 juin 2019 @ 7:00 - 9:00
26,94$
Chants sacrés perdus et retrouvés, IXe – XIIe siècles
Concert 10e anniversaire avec chef invité Pascale Duhamel
L’Ensemble Scholastica s’est taillé une place privilégiée dans le domaine québécois de la musique médiévale en tant que seul ensemble vocal professionnel de femmes se consacrant à l’interprétation du chant et de la polyphonie sacrés du Moyen Âge. L’ensemble s’est démarqué entre autres par sa présentation de l’Ordo Virtutum de Hildegard von Bingen, par plusieurs participations au Festival Montréal Baroque, à l’Internationale des musiques sacrées de Québec, à la programmation de la Salle Bourgie du Musée des beaux-arts de Montréal, et par un disque (Ars elaboratio) enregistré sous étiquette ATMA classique. Or, cette saison 2018-2019 sera marquée par le dixième anniversaire de sa fondation. En effet, c’est en novembre 2008 que la musicologue Pascale Duhamel avait réuni autour d’elle et formé une équipe de chanteuses dans le but de lancer l’ensemble que nous allions devenir. Elle nous a dirigé lors de notre premier concert en avril 2009, et pendant tous nos concerts à suivre jusqu’en octobre 2011. Afin de fêter ce dixième anniversaire, nous avons décidé d’inviter notre fondatrice à créer et diriger un événement spécial.
Dans le cadre de ses activités d’enseignement, Pascale Duhamel a dirigé les travaux d’un étudiant – Sylvain Margot – visant à retracer le patrimoine de musique médiévale sacré du comté médiéval de la Haute-Marche (actuellement le département de la Creuse). Plusieurs chants inédits ont été mis au jour dans différents fragments de manuscrits musicaux. Notre événement anniversaire consiste donc en la création mondiale de cette musique entièrement originale datant d’entre le IXe et le XIIe siècle.
Pascale Duhamel est musicologue et professeure à l’Université d’Ottawa, après avoir enseigné et poursuivi ses recherches en Europe et à Toronto. Elle publie régulièrement dans son domaine de recherche et prépare actuellement la publication de sa deuxième monographie. Elle maintient également, depuis sa formation en chant grégorien au Centre de Musique Médiévale de Paris, sa pratique musicale au sein de l’Ensemble Bellechose.
Le programme de recherche de Sylvain Margot qu’elle a dirigé à l’Université d’Ottawa en 2015-2017 a eu des résultats inespérés. Après plusieurs mois de recherche dans les bibliothèques et archives régionales du département de la Creuse, ainsi que dans les fonds de manuscrits des villes de Tours et Paris, des chants liturgiques que l’on retrouve dans aucune autre source connue ont été découverts pour les fêtes des saints locaux Pardoux et Yrieix et pour la fête de la Conception de la Vierge. La musique ainsi découverte représente 46 mélodies originales réparties en 17 antiennes et 7 répons pour saint Pardoux, 2 répons et 3 antiennes pour saint Yrieix, ainsi que 12 antiennes et 4 répons pour la Conception de la Vierge. À l’exception d’un répons et d’une antienne, ces mélodies sont toutes complètes. L’importance de ce répertoire repose dans le fait que le patrimoine médiéval de la Haute-Marche, une petite zone aux confins du Poitou et du Limousin, a souffert énormément des nombreux désordres et guerres qui jalonnent son histoire. Il met donc en lumière un patrimoine qui avait été perdu pendant au moins huit cents ans. Son intérêt repose également dans sa musique. En effet, ces mélodies ont été en grande partie composées au XIIe siècle, et sont le résultat, comme beaucoup de monodies composées au même moment, d’une réactualisation du chant grégorien ; ces mélodies se caractérisent par conséquent par des contours mélodiques novateurs, inhabituels, voire étranges, non sans rappeler certaines sonorités de l’œuvre d’Hildegarde de Bingen (1098-1179). Elles viennent donc rejoindre, auprès de cette dernière et de Pierre Abélard entre autres, un corpus musical sacré composé au XIIe siècle et encore peu connus, à l’exception d’Hildegarde, et présentant des contours musicaux tout-à-fait originaux.
Ce projet correspond véritablement à un sauvetage du patrimoine médiéval sacré d’une région française, qui peine à le reconstituer en raison de son histoire mouvementée. En termes de recherche et de connaissance du répertoire musical, l’impact de ce projet est déjà important et pourrait rejoindre les spécialistes travaillant sur le patrimoine de la Haute-Marche, les habitants de cette région ainsi que les amateurs de l’histoire musicale médiévale à l’échelle mondiale. Il s’agit donc en réalité d’une véritable création mondiale d’un répertoire musical ayant été perdu pendant plus de huit cents ans. La musique en cela est privilégiée : alors que des réalisations artistiques ayant vu le jour dans un contexte spirituel, et ayant été reconnues comme faisant partie du patrimoine culturel et humain du monde entier, ont été définitivement perdues lors des conflits des dernières décennies, la musique peut parfois revenir de l’oubli pour autant que des morceaux épars de parchemins en gardent encore la marque. Tout comme les Bouddhas d’Afghanistan, la musique médiévale sacrée est avant toute chose une partie du patrimoine humain et artistique, illustrant la profonde aspiration de l’Humain à donner un sens à son existence. Le travail de l’Ensemble Scholastica contribue ainsi à redécouvrir la valeur humaine et esthétique de ces chants en mettant en lumière la beauté de leurs lignes musicales, la variété des ornementations et des mouvements rythmiques, d’un texte racontant à la base « une bonne histoire », et de la voix pleine à l’unisson.
