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CRITIQUE | Kent Nagano et l'OSM lancent leur saison avec un message pour notre époque tourmentée

Par Caroline Rodgers le 18 septembre 2019

Kent Nagano a ouvert sa dernière saison comme directeur musical de l’OSM en dirigeant la Symphonie Babi Yar de Chostakovitch, avec la participation du Choeur d’hommes de l’OSM préparé par Andrew Megill. (Photo : Antoine Saito)

C’était le grand soir, hier, à la Maison symphonique : le premier concert de la dernière saison de Kent Nagano à l’Orchestre symphonique de Montréal avec la Symphonie no 13 « Babi Yar » de Chostakovitch. Une symphonie fleuve, ode à la Russie mais aussi, message d’outre-tombe toujours aussi pertinent et actuel d’un poète et d’un compositeur pour notre époque tourmentée.

Après les remerciements usuels de Lucien Bouchard, président du conseil d’administration de l’OSM, le concert, donné sans entracte, commence avec la Rhapsodie sur un thème de Paganini, op. 43, de Rachmaninov.

 

Denis Matsuev interprétant Rhapsodie sur un thème de Paganini de Rachmaninov hier soir à la Maison symphonique. (Photo : Antoine Saito)

Le soliste invité est le Russe Denis Matsuev, véritable machine pianistique, capable de tout jouer avec aisance et de produire une ample sonorité qui se détache clairement de l’orchestre, mais dont la pensée musicale est inversement proportionnelle aux moyens techniques. Il sera aussi le soliste invité de l’OSM pour son concert de Chicago, le 15 octobre.

Désinvolte, puissant, rapide, le pianiste est certes capable de nuances et de belles phrases, mais on le sent plus ou moins engagé dans sa musique et il n’a que peu de choses à dire alors que cette Rhapsodie offre à son interprète tant de possibilités. Toutefois, jouer vite et fort épate toujours la galerie et ceux qui croient que c’est cela, le piano.

Symphonie no 13 – Babi Yar

On passe des feux d’artifices à la littérature avec la pièce de résistance, la Symphonie no 13 de Chostakovitch « Babi Yar ».

Le héros de cette prestation est l’extraordinaire basse russe Alexander Vinogradov, solide comme un roc et qui le restera, sans faille, jusqu’à la fin de cet exploit. Il fait entendre une voix souple, dotée d’un timbre tellement agréable qu’on rêve de l’amener chez soi pour l’écouter jour après jour.  On ne pourrait pas s’en lasser. Un vibrato léger et contrôlé convient parfaitement au sujet de l’oeuvre en évitant d’y ajouter la moindre lourdeur. C’est l’interprète parfait d’une telle oeuvre.

 

La basse russe Alexander Vinogradov possède une voix souple, dotée d’un timbre agréable. (Photo : Antoine Saito)

Les paroles traduites du russe en français et en anglais sont projetées sur un écran au-dessus de la scène, pour permettre de suivre plus facilement cette vaste fresque poétique dédiée aux 33 771 Juifs victimes du massacre de Babi Yar, en Ukraine, en 1941.

Cette charge coup de poing contre l’antisémitisme aborde d’autres épisodes et d’autres personnages, tels que l’affaire Dreyfus et Anne Frank. En parlant à la première personne, le narrateur se glisse dans la peau de ces Juifs victimes de la haine. On est captivé à la fois par la musique, par la voix du chanteur et par les paroles. Ce n’est pas une soirée que l’on oubliera de sitôt.

En choisissant cette symphonie, Kent Nagano perpétue une ligne de pensée qu’il lègue à l’OSM et qu’il explique très clairement dans son livre Sonnez merveilles, à savoir que la musique a un rôle social essentiel à jouer, qu’elle porte des valeurs et peut être un phare pour l’humanité. Tout au long de ses années comme directeur musical de l’OSM, il a toujours eu le souci d’amener une réflexion et un riche bagage intellectuel à l’orchestre à travers ses choix artistiques.

Au-delà des autres aspects de son héritage comme chef, cette audace de programmer des œuvres d’une grande portée philosophique va à contre-courant de notre époque superficielle et marque une volonté ferme d’inscrire l’OSM comme une institution portant ces valeurs humanistes qui lui sont chères. On ne peut que l’en remercier.

Sur le plan musical, la prestation de l’orchestre souligne les nuances à gros traits, dans un esprit grandiose, mais avec un résultat un peu en-dessous de cette ligne qui démarque les œuvres que l’OSM joue régulièrement depuis des années de celles qui n’ont pas encore eu le temps de mûrir.

Bien que tout soit en place, il reste encore à détailler les choses avec plus de subtilité, à raffiner la diversité des nuances et des plans sonores. Un moment de beauté se détache: le début tout en finesse de l’Allegretto final. Pour le reste, je ne suis aucunement inquiète de la suite des choses, encore quelques répétitions et elle sera prête pour le concert de l’orchestre à Carnegie Hall en mars prochain.

Le Chœur de l’OSM, une section d’hommes augmentée pour l’occasion et préparée par Andrew Megill, n’a pas une partition musicale nécessairement difficile à chanter, et le fondu des voix est réussi. Les paroles en russe sont bien projetées. 

On restera marqué par ce concert et par son message fort à ce moment précis de notre histoire où le racisme montre son visage le plus laid, sans gêne, un peu partout.

VOUS VOULEZ Y ALLER?

Concert d’ouverture: Kent Nagano dirige la Symphonie « Babi Yar » de Chostakovitch, mercredi 18 septembre, 20h, Maison symphonique. DÉTAILS

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