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RENCONTRE | Ma visite avec Samy Moussa au Musée des beaux-arts de Montréal et notre discussion sur sa prochaine création

Par Caroline Rodgers le 18 avril 2018

Samy Moussa, compositeur et chef d'orchestre. (Crédit: Harald Hoffmann/Durand-Salabert-Eschig, Paris.
Samy Moussa, compositeur et chef d’orchestre. (Crédit: Harald Hoffmann/Durand-Salabert-Eschig, Paris.

 

Parce que les compositeurs sont avant tout des créateurs, il est intéressant de les rencontrer dans des lieux où la création est mise en valeur, par exemple, les musées, pour apprendre à mieux les connaître. C’était donc au tour de Samy Moussa, compositeur et chef d’orchestre de 33 ans dont le Concerto pour quatuor à cordes et orchestre sera créé vendredi soir par l’Orchestre Métropolitain et le Quatuor Molinari, de visiter un musée en ma compagnie cette semaine. Nous avons visité le Musée des beaux-arts de Montréal, parlé des vanités – et non de « la » vanité – de son quatuor et de bien d’autres choses.

Premier constat: Samy est un homme qui a des goûts très précis. Nous nous dirigeons donc assez rapidement vers le 3e étage du nouveau Pavillon pour la Paix Michal et Renata Hornstein, qui est dédié au Siècle d’or en Hollande et en Flandres, dans une section appelée « Cabinet de curiosité ».

« J’aime bien, moi-même, collectionner divers objets que je trouve, notamment en voyage, raconte le compositeur. J’adore visiter, entre autres, les endroits désertiques aux États-Unis, comme Death Valley, l’Arizona, le Texas. Je suis en train de me faire un petit cabinet de curiosités chez moi, avec des trucs que je ramasse. »

Chez lui, pour le moment, c’est à Berlin. Auparavant, il a vécu à Montréal, Munich et Rome. Il vient au Québec trois ou quatre fois par an. La semaine prochaine, il sera à New York. Véritable cosmopolite, Samy Moussa voyage sans doute plus que la moyenne des compositeurs québécois, mais il considère comme sa maison l’endroit où sont rangés ses livres. Récemment lauréat d’une bourse de l’Académie d’Allemagne à Rome, il ira passer un an dans cette ville pour travailler à la Villa Massimo.

Arrivés au troisième étage, nous trouvons ce qu’il voulait voir: des vanités, un genre particulier de tableau où sont réunis des objets destinés à nous rappeler la vanité et la vacuité des choses de ce monde, et le passage du temps : fleurs et fruits, certes, mais aussi bougie qui se consume, sablier ou crâne. Le MBAM a une jolie petite collection, dont le parfait exemple ci-dessous:

 

Vanité de N.L Peschier (1660) - Collection du Musée des beaux-arts de Montréal.
Vanité de N.L Peschier (1660) – Collection du Musée des beaux-arts de Montréal.

 

 

Samy ne raffole toutefois pas des têtes-de-mort. Son regard est attiré vers une nature morte avec des oranges pelées de Cornelis de Heem, dont il apprécie la composition.

 

Nature morte, Cornelis de Heem, vers 1665, Collection de Musée des beaux-arts de Montréal.
Nature morte, Cornelis de Heem, vers 1665, Collection de Musée des beaux-arts de Montréal.

 

 

Tandis que nous nous dirigeons vers d’autres pavillons du MBAM pour jeter un coup d’œil à des oeuvres plus modernes, une question me vient à l’esprit:

« Tu as composé une symphonie pour l’OSM, et un Concerto pour l’OM. Je remarque qu’il est assez rare, chez les compositeurs de ta génération, d’avoir reçu des commandes des deux orchestres pour des oeuvres d’envergure. »

 

« Le nom de l’orchestre m’importe peu. Ce qui est important, pour moi, c’est d’aller à la rencontrer des musiciens dans mon pays et dans ma ville, et j’ai très hâte d’aller à la rencontre des musiciens de l’Orchestre métropolitain. » – Samy Moussa

 

Au fil de la conversation en déambulant dans le musée, nous découvrons  Paysage près de Coblence (1987) une huile sur toile très réaliste – on dirait une photo – du peintre Allemand Gerhard Richter.

« C’est un de mes peintres préférés, dit Samy. J’aime la totalité de son oeuvre. »

 

Paysage près de Coblence (1987), huile sur toile Gerhard Richter, Collection du Musée des beaux-arts de Montréal.
Paysage près de Coblence (1987), huile sur toile Gerhard Richter, Collection du Musée des beaux-arts de Montréal.

 

Comme le musée est sur le point de fermer ses portes, nous allons nous réfugier au charmant Café Aunja, rue Sherbrooke, pour une collation et pour la partie plus formelle de notre entretien.

Caroline Rodgers: ton concerto a-t-il une forme classique en trois mouvements? 

Samy Moussa: « J’ai numéroté, dans la partition, trois parties, mais la pièce est totalement enchaînée. Je pense qu’en réalité, c’est plus un grand mouvement que trois parties. Ces parties n’ont pas de nom. C’est vraiment une pièce très abstraite parce que la pièce n’a pas de titre, concerto n’étant pas un titre à proprement parler. Il n’y a pas de programme et c’est totalement assumé. »

Caroline Rodgers: le quatuor joue-t-il seul à certains moments, comme un soliste dans les concertos traditionnels? 

Samy Moussa: « Il joue seul une seule fois dans la pièce, pendant une minute. Ce n’est pas une cadence, d’ailleurs. Il n’y a aucun passage où le quatuor est là pour faire de la bravoure et démontrer qu’ils sont formidables. Ce n’est pas du tout le but de la pièce. Ça s’appelle un concerto mais il n’y a aucun but de virtuosité. Le passage solo n’est pas une cadence, c’est solo parce que, sur le plan de la dramaturgie, c’était ce qu’il fallait. Ce qu’il faut savoir, c’est que dans cette pièce, le quatuor ne fait qu’un, comme si c’était une seule personne, une seule entité. Ce ne sont pas quatre personnes qui jouent des instruments solo. Le quatuor, très souvent, joue en bloc, très exactement la même chose. C’était le parti pris, l’idée de la pièce. Dans mon écriture, c’était important qu’ils soient toujours rassemblés comme un super instrument que plutôt deux violons, un alto et un violoncelle. »

Caroline Rodgers: avais-tu déjà écrit pour quatuor à cordes?

Samy Moussa: « J’ai écrit un seul quatuor à cordes, qui date de 2012.  »

 

 

Caroline Rodgers: es-tu un grand amateur du répertoire pour quatuor à cordes? 

Samy Moussa: « Je ne suis pas un grand adepte de la musique de chambre. J’aime certaines oeuvres auxquelles je reviens régulièrement, et certains compositeurs, mais ce n’est pas ce qui m’attire le plus. J’ai très peu écrit de musique de chambre. »

Caroline Rodgers: préfères-tu composer des oeuvres courtes ou longues? 

 

« C’est la pièce qui me commande la forme. Par exemple, pour ce concerto, je prévoyais inclure cinq mouvements. En cours de route, j’ai réalisé que ça n’allait pas fonctionner. Cette musique que j’étais en train d’écrire me commandait une autre organisation. J’ai compris qu’il fallait qu’il y ait moins de sections, pour des questions de proportions, pour en arriver à cette forme, qui était commandée par le contenu que j’avais créé. » – Samy Moussa

 

Caroline Rodgers: t’arrive-t-il de composer des oeuvres de manière impromptue, simplement parce que tu as une idée? 

Samy Moussa: « Non. Je ne peux pas composer si je n’ai pas de commande, parce qu’il faut que je sois convaincu que la pièce sera jouée, et ce, dans de bonnes conditions. Sinon, je n’écris pas. La commande, pour moi, ne représente pas du tout l’aspect financier, mais la réalisation d’un projet. J’ai souvent du mal à commencer une nouvelle pièce, mais heureusement, je compose assez rapidement, donc l’équilibre se fait. Et entre les pièces, il y a toujours du temps. Je n’enchaîne pas les compositions et je ne travaille pas sur deux en même temps. Quand je termine une pièce, je n’en commence pas tout de suite une autre.  »

Caroline Rodgers: que vas-tu faire à Rome?

Samy Moussa: « J’ai de gros projets à composer sur lesquels je vais travailler. Ce sera une saison particulière pour mes activités de chef d’orchestre, car je ne dirigerai presque aucun concert, contrairement à cette saison-ci où j’ai été très occupé. »

Caroline Rodgers: d’autres projets qui s’en viennent? 

Samy Moussa: « Cet été, je vais diriger deux programmes avec l’Orchestre de l’Opéra de Bavière, pendant leur festival d’été. On me fait l’immense honneur de diriger la messe qui lance le festival. J’ai choisi la messe « Nelson », de Haydn. Nous allons aussi jouer une de mes créations, une pièce pour huit cors spatialisés. C’est ma première composition spatialisée, d’ailleurs. À plus long terme, j’ai aussi la composition d’un opéra, un projet très sérieux dont je ne peux pas parler encore en détails. »

On pourra entendre le Concerto pour quatuor à cordes et orchestres ce vendredi, 20 avril, 19 h 30, à la Maison symphonique, sous la direction du chef Nicholas Carter. Aussi au programme:  Four Sea Interludes, de Britten, Tableaux d’une exposition, de Moussorgski, et l’Étoile noire, de François Morel. 

ACHETER DES BILLETS. 

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