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OPINION | Prime à la nudité au Metropolitan Opera: sommes-nous vraiment rendus aussi bas?

Par Caroline Rodgers le 20 octobre 2017

 

Controverse au Metropolitan Opera (Crédit: Luigi Novi).
Controverse au Metropolitan Opera (Crédit: Luigi Novi).

Selon le quotidien britannique The Telegraph et d’autres médias, le Metropolitan Opera de New York aurait offert un salaire ajusté en fonction de la quantité de peau que sont prêtes à montrer certaines surnuméraires jouant le rôle de prostituées vénitiennes dans la production actuellement à l’affiche des Contes d’Hoffmann.

Celles qui font le rôle en portant uniquement une petite pastille pour cacher leurs mamelons et un string sont payées 438 $ par spectacle, dans quatre ou cinq des neuf représentations prévues. Dans les autres spectacles, où elles porteront plutôt un soutien-gorge et des petites culottes, leur salaire sera coupé à 235 $.

Les scènes de nudité à l’opéra sont de plus en plus monnaie courante. Celles-ci sont parfois tout à fait justifiées par le scénario, comme dans Les Feluettes à l’Opéra de Montréal, où l’on voyait Étienne Dupuis et Jean-Michel Richer prendre un bain. Toutefois, elles sont bien plus souvent gratuites et sensationnalistes, dans ce qui ressemble à un effort désespéré de la part de certaines maisons d’opéra pour avoir l’air…avoir l’air quoi? Difficile à dire. Plus moderne? Plus cool?

Déjà, on ne peut qu’être sceptique quant à l’authenticité historique d’un tel accoutrement, même chez des prostituées, à l’époque où se déroulent les Contes d’Hoffmann. Les autres participants de la production portent d’ailleurs des costumes d’époque. On se demande aussi quel public les maisons d’opéra espèrent attirer en exploitant gratuitement la nudité. Nul besoin d’aller à l’opéra pour voir des femmes nues, ou en petite tenue, car il suffit simplement d’allumer un ordinateur. En principe, on va à l’opéra parce qu’on aime la musique et pour y trouver un spectacle que l’on ne trouve nulle part ailleurs, celui de voix exceptionnelles mises en valeur dans un écrin somptueux. Dans le cas du Met, ce sont souvent les plus belles voix du monde. Ont-ils vraiment besoin de jouer cette carte pour faire le plein de spectateurs? D’autant plus que si on regarde cette production jouissant d’un énorme budget, elle est déjà amplement spectaculaire, avec ou sans prostituées vénitiennes à poil (ou presque).

D’autre part, ce n’est un secret pour personne que le Metropolitan Opera a d’énormes problèmes financiers depuis des années, comme ne le cessent de le confirmer des coupes budgétaires depuis des années, et des offres de départs volontaires récentes.

Quelle que soit sa situation financière, que la plus grande maison d’opéra du monde fasse de surcroît des petites économies sur le dos de ses surnuméraires en fonction de leur degré de nudité et des exigences d’un metteur en scène est tout simplement odieux. Les Contes d’Hoffmann seront-ils vraiment meilleurs s’il y a des femmes nues sur scène? Ou le succès de la production ne devrait-il pas reposer sur ses mérites artistiques, la qualité de ses chanteurs, la beauté de ses décors, l’excellence de sa musique?

« Cette coupe salariale suggère que la valeur du travail de ces actrices est négligeable, et que la seule chose qui leur donne de la valeur est la nudité », a commenté une source ayant requis l’anonymat au site new-yorkais Patch, qui présente un article assez complet sur cette histoire.

Il est monnaie courante que des vedettes de cinéma se font offrir des primes en fonction de ce qu’elles veulent bien laisser voir. Dans le cas du Met, on parle toutefois, ici, de personnes au bas de l’échelle salariale (parmi celles qui montent sur scène), et qui n’ont pas vraiment le loisir d’aller ailleurs. Souvent, les figurants et surnuméraires sont des diplômés en musique, des chanteurs et chanteuses qui n’obtiennent pas de rôles chantés. Ces jeunes femmes ne peuvent donc pas, à l’instar d’une star du cinéma, imposer leur bon vouloir en menaçant de claquer la porte.

Alors que les dénonciations se multiplient contre les harceleurs, les violeurs, et de façon plus générale, contre toutes les formes d’exploitation des femmes et de leur corps, c’est une bien mauvaise décision de la part du Metropolitan Opera que d’avoir pris ce chemin, sous prétexte d’économies.

Sommes-nous rendus aussi bas, dans le monde de l’opéra?

Ce sont plutôt les gestionnaires médiocres du Met qui devraient subir des coupes salariales.

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