Fred Pellerin et l’Orchestre symphonique de Montréal sont de retour sur la scène de la Maison symphonique, ces jours-ci, pour leur traditionnel conte de Noël musical, sous la direction de Kent Nagano. Une soirée qui passe vite comme l’éclair au fil d’un récit qui nous ramène au cœur du village de Saint-Élie-de-Caxton, avec ses personnages fantaisistes et ses dénouements impossibles composant un réalisme magique à la sauce québécoise.
Cette fois, il est question de Méo Bellemarre, le barbier du village, des bonnes sœurs enseignantes qu’il doit coiffer « sans enlever la capine » une fois par mois, de cinq abeilles qui produisent un miel au goût de « paparmane », et de ce qui est sacré en ce bas monde. Le tout est ponctué de rebondissements, de métaphores, de blagues et bien entendu, de musique.
Comme par les années antérieures, une gigantesque boule de Noël surplombe la scène et nous montre des images et des couleurs changeantes.
Avec Le secret de Polichignon, Fred Pellerin se surpasse dans les jeux de mots brillants (l’amante religieuse, le serment d’hypocrite, et tant d’autres qui nous rappellent sans contredit l’esprit et le génie de Sol). Bien choisies, les pièces musicales sont habilement intercalées avec le récit et parfois même superposées à la narration, comme les deux courtes compositions de Maxime Goulet commandées par l’OSM.
On apprécie particulièrement le grandiose déploiement de La grande porte de Kiev, mouvement des Tableaux d’une exposition de Moussorgski, qui suit une description du premier lever du jour de l’histoire, façon Fred Pellerin.
Quelque part, non loin d’une vallée, vivent une grand-mère et son petit-enfant échevelé. De nombreuses personnes viennent, observent la vallée, et déclarent qu’un jour, tous ce qui est visible en ces lieux ainsi que les moindres ressources que l’on pourra en extraire leur appartiendra.
Mais lorsque le soleil se lève enfin sur la vallée, la grand-mère confie à l’enfant que « la lumière n’appartiendra jamais à personne » façon de dire que malgré la volonté qu’ont certains de tout posséder, vendre et acheter, les meilleures choses, et les plus essentielles, ne pourront jamais être monnayées.
Un autre message ressort du conte, et c’est que « Les gens et les lieux ne sont pas sacrés. Seuls les moments sont sacrés », comme ce baiser unique du fantôme de Solange, la nonne blonde dont Méo le barbier est tombé amoureux. C’est elle, son « amante religieuse ».
En plus de rire et d’entendre rire en cette soirée qui nous plonge dans l’esprit des Fêtes, j’observe autour de moi des visages heureux, des sourires et les yeux brillants des spectateurs qui retrouvent, pour quelques instants, un sens de l’émerveillement dont le bombardement constant des stimuli de la vie moderne nous prive au quotidien. Ces visages qui s’illuminent grâce à la musique et au conte, ils font un peu partie de ces moments sacrés, eux aussi.
Ce spectacle a été capté par Radio-Canada et sera diffusé sur ICI Télé, le 23 décembre à 20 h. Il reste aussi quelques billets pour les dernières représentations, qui ont lieu le samedi 16 à 14 h30 et à 19 h30, et le dimanche 17 à 14 h 30. DÉTAILS