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CRITIQUE | Orchestre Métropolitain: l'étrange beauté d'un concerto introspectif et touchant

Par Caroline Rodgers le 11 février 2023

Thorwald Jorgensen, théréministe, était le soliste invité de l'Orchestre Métropolitain, sous la direction de la cheffe Daniela Candillari, le 10 février 2023. (Photo: François Goupil)
Thorwald Jorgensen, théréministe, était le soliste invité de l’Orchestre Métropolitain, sous la direction de la cheffe Daniela Candillari, le 10 février 2023. (Photo: François Goupil)

Si cette critique était un émoji, ce serait un cœur. Pas un banal cœur rouge, mais un cœur noir. C’est ce que m’inspire le Concerto pour thérémine de Simon Bertrand créé cette semaine à Montréal par l’Orchestre Métropolitain, et que nous avons entendu à la Maison symphonique hier soir, 10 février.

Le tout commence par l’Ouverture du Vaisseau fantôme, de Richard Wagner, où tout est bien en place. Si la cheffe invitée, Daniela Candillari, n’est peut-être pas la plus spectaculaire qu’il nous eut été donné de voir monter sur le podium à la Maison symphonique, elle n’en est pas moins une vraie musicienne qui sait ce qu’elle fait, qui comprend les œuvres qu’elle dirige et transmet des intentions musicales conformes à la partition. Elle mérite tout autant le respect qu’une multitude de chefs invités de stature artistique équivalente que nous avons vus défiler dans cette salle au fil des ans, pour le meilleur et pour le pire.

Si la Symphonie no 7 de Antonín Dvořák est peut-être ce qui a fait vendre des billets au spectateur moyen, le spectateur curieux, lui, était venu pour entendre un thérémine « en vrai » pour la première fois, joué par Thorwald Jorgensen, un maître de cet instrument dont il a tiré des sons irrésistibles et se rapprochant de la voix humaine. Et qui sait? Certains seront venus aussi pour découvrir cette nouvelle création d’un compositeur québécois. C’était mon cas.

Parlons des Cinq moments trépidants dans la vie de Léon Thérémine. D’emblée, il faut dire que la présence du mot « trépidant » dans le titre aura probablement eu pour effet de susciter certaines attentes, étant d’ordinaire associé à l’aventure et aux rebondissements. S’il est une seule chose, alors, que Simon Bertrand pourrait changer dans sa pièce de vingt minutes, c’est simplement le titre, car il ne doit, en aucun cas, changer la moindre note.

Sobriété et introspection

Il existe plusieurs façons de raconter une histoire ou de brosser un portrait. Demandez aux romanciers et aux peintres. Chacun a sa vision d’une personne, d’un événement, d’un récit. C’est ce qui fait la beauté de l’art. Dans son récit de la vie de Léon Thérémine, Simon Bertrand, artiste sensible et réfléchi, semble avoir vu au-delà des péripéties pour raconter le monde intérieur d’un humain dont l’existence a été tragique sous plusieurs aspects, et de son époque, avec ses côtés sombres (et c’est pour cela, l’émoji du cœur noir).

Quand on écoute ces « Cinq moments… » on a l’impression d’ouvrir une boîte de mystérieuses photos en noir et blanc, peuplées d’inconnus au regard énigmatique, fixant l’objectif ou vaquant à leurs occupations dans une dimension évanescente et désormais inaccessible. Qu’ont-ils pensé? Qu’ont-ils vécu? Et qui ont-ils aimé? Ces souvenirs d’un passé insaisissable sont disparus à jamais, mais il est possible, à travers l’art, d’en ressentir une fugace impression, comme si l’artiste, avec son imagination, était parvenu à en saisir l’essentiel pour nous le transmettre. Et s’ils y parviennent, c’est que leur œuvre, au-delà de son titre ou des prouesses techniques ou sonores attendues d’un instrument, est réussie.

Est-ce à dire que la musique que nous avons entendue est passéiste? Pas du tout. Je dirais plutôt qu’elle est intemporelle.

 

Simon Bertrand, Thorwald Jorgensen, Daniela Candillari (Photo: François Goupil)
Simon Bertrand, Thorwald Jorgensen, Daniela Candillari (Photo: François Goupil)

Dans l’ensemble, ce concerto introspectif, qui puise plusieurs mesures à la beauté de la mélodie du Cygne, de Saint-Saëns, modifiée, est une œuvre profonde à l’esthétique sobre et touchante. Le compositeur a résisté à la tentation d’en faire trop avec les potentiels « effets » du thérémine pour suivre son inspiration et une ligne directrice axée sur la fusion des timbres et la création d’atmosphères plutôt que sur les effets surprise et la narration. Au vu de l’effet produit, il a eu raison, et on espère que cette œuvre sera enregistrée, par cet orchestre ou par un autre.

Après le concerto, Thorwald Jorsgensen nous a fait l’immense plaisir d’un rappel, une de ses propres compositions où le thérémine évoque la mer et les oiseaux, un vrai moment de magie, également tout en sobriété.

Une obligation m’ayant contrainte à partir à l’entracte, je n’ai malheureusement pas pu entendre la Symphonie no 7 de Dvořák. Malgré cela, cette soirée demeurera quand même gravée dans ma mémoire.

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