Jordi Savall est de passage à Québec, Montréal et Ottawa cette semaine avec son ensemble, Hespèrion XXI, pour le programme « L’âge d’or de la musique pour consort ». Avec d’autres médias, nous avons échangé avec lui par visioconférence alors qu’il était encore à Barcelone.
Grand sage de la musique et de la vie, il confie qu’à 81 ans, il continue toujours d’apprendre, et que c’est pour lui une source de bonheur. « Quand on apprend, on est heureux », dit-il.
LVM: « Qu’avez-vous appris récemment qui vous a particulièrement intéressé?
Jordi Savall: « Par exemple, avec mon orchestre Le Concert des Nations, nous venons de travailler la Symphonique italienne de Mendelssohn dans les versions de 1833 et 1834 et c’était formidable. On est partis des manuscrits originaux, on a récupéré les versions que l’on connaît moins, avec un orchestre exactement comme à l’époque, et c’est un travail fabuleux, parce que vous découvrez des choses qui n’existent pas, aujourd’hui. Le son d’un orchestre moderne, dans ce type de musique, est totalement différent de ce qui existait à l’époque. Le travail que l’on fait aujourd’hui à partir des partitions, donne d’excellents résultats.
Je compare le travail que nous faisons avec ce qui a été fait, parfois, dans certaines églises, avec de très vieilles peintures qui étaient là depuis des siècles et qui étaient salies par le temps, la fumée des cierges. Elles sont devenues plus sombres, ténébreuses. On a nettoyé cette saleté et on a découvert des couleurs étonnamment brillantes. Je pense que nous faisons la même chose, en redonnant à ces partitions leurs couleurs originales. »
LVM: pouvez-vous nous parler de ces trois concerts au Canada et de ce que vous allez jouer ici?
Jordi Savall: « Je viens avec notre version Hespèrion XXI de consort de violes. Nous allons faire un programme avec les plus belles pièces de consort de violes de 1550 à 1750. On couvre pratiquement 200 ans de musique pour consort de violes en partant des plus belles compositions de l’époque élisabéthaine pour arriver jusqu’à L’art de la fugue, de Bach. Avec la pièce de Joan Cabanilles, L’art de la fugue est la seule pièce que nous jouons qui n’est pas composée pour la viole. Mais j’ai moi-même enregistré tout L’art de la fugue en 1985, et ça sonne magnifiquement sur la viole. Cela dit, le répertoire pour consort de viole est parmi les plus belles musiques pour ensembles de chambre. »
LVM: une question qui sort un peu du cadre: vous savez qu’aujourd’hui, beaucoup de gens écoutent de la musique sur des plateformes en ligne. Récemment, des enquêtes ont démontré que tous genres musicaux confondus, ces auditeurs préfèrent la musique du passé à celle d’aujourd’hui. Comment expliquez-vous ce phénomène?
Jordi Savall: « On ne peut pas généraliser, mais c’est peut-être simplement parce qu’avant, on a réussi à faire de très belles choses. Ce qu’on fait les Beatles est quand même extraordinaire. Il y a beaucoup d’ensembles qui ont fait des choses magnifiques. Aujourd’hui, on fait beaucoup de bruit et il y a beaucoup moins de substance. On veut être tellement moderne, tellement nouveau, que l’on perd un peu la substance des choses. Peut-être que dans les musiques du passé, il y a plus de poésie. Ce que je constate, c’est que dans nos concerts, il y a beaucoup plus de jeunes que dans les programmes habituels d’orchestres symphoniques, et nous attirons même plus de gens qui n’ont pas l’habitude d’aller au concert. »
Jordi Savall et Hespèrion XXI: L’âge d’or de la musique pour consort »
Québec: au Palais Montcalm, 6 novembre, 15 h. BILLETS
Montréal: Maison symphonique, 7 novembre, 19h30 BILLETS
Ottawa: Centre Carleton Dominion-Chalmers, 8 novembre, 19h30 BILLETS
Au programme, des œuvres d’Innociento Alberti, Jean-Sébastien Bach, Joan Cabanilles, Antonio de Cabezón, John Dowland, Alfonso Ferrabosco, Orlando Gibbons, Giuseppe Guami, John Jenkins, William Lawes, Giovanni Maria, Henry Pucell, Samuel Scheidt, Christopher Tye et de Clement Woodcock.
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