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ENTREVUE | Hervé Niquet: voyage au Québec avec Marc-Antoine Charpentier

Par Caroline Rodgers le 27 septembre 2022

Entretien avec Hervé Niquet

Hervé Niquet (photo: courtoisie)
Hervé Niquet (photo: courtoisie)

Grand spécialiste du répertoire baroque, Hervé Niquet visite Québec et Montréal cette semaine pour diriger Clavecin en concert et des solistes invités pour « Charpentier: entre triomphe et piété », au Palais Montcalm et à la Salle Bourgie. Entretien. 

LVM: « Parlez-nous de vos collaborations antérieures avec Clavecin en concert »

Hervé Niquet: « Je connais Luc Beauséjour depuis plus de vingt ans. Nous avons fait une tournée de concerts à deux clavecins, je l’ai invité en Europe, et on a aussi enregistré un très beau disque sur Analekta, bref, on a fait beaucoup de choses ensemble. »

LVM: « Pouvez-vous nous parler du programme des concerts présentés cette semaine? » 

Hervé Niquet: « C’est de la musique parisienne d’apparat, le Te Deum est une pièce pour des fêtes importantes, mariages royaux ou princiers, par exemple. Les deux autres sont des motets. Le premier a été écrit pour la Duchesse de Guise, son employeuse principale, et l’autre, le Miserere, a été composé pour les Jésuites de la rue Saint-Antoine. Donc c’est de la grande musique parisienne, qui nécessite pas mal d’effectifs, il faut cinq solistes, un chœur, et un orchestre où l’on retrouve deux trompettes et des timbales. Pour Montréal, nous serons une trentaine de musiciens et chanteurs sur scène, soit 17 instrumentistes, et 13 chanteurs. »

LVM: « Tout récemment, vous avez lancé un album Haendel avec le Concert Spirituel. Pourquoi ne pas avoir choisi un programme Haendel pour vos concerts au Québec? » 

Hervé Niquet: « Haendel requiert des effectifs encore plus importants. De plus, ici à Montréal, on fait très peu de musique française, donc je trouvais bien d’apporter ici, dans mes bagages, de la musique française que je connais bien, que j’enregistre depuis trente ans. Je trouve très important d’apporter ce que je sais faire dans ce répertoire qui est peu donné ici en concert. Le Te Deum est très connu, mais les deux motets sont presque inédits, ils ont été peu donnés en Europe. Cela nous fait une pièce très emblématique de la musique française avec le Te Deum, et deux pièces moins connues. Je trouve cela plus judicieux que d’amener du Haendel, mais c’est aussi bruyant et aussi sonore que du Haendel. »

LVM: « Souvent les musiciens et chefs baroques font eux-mêmes des recherches musicologiques, est-ce votre cas? »

Hervé Niquet: « Bien sûr, je fais cela depuis quarante ans. J’ai toujours ma carte d’entrée comme chercheur à la Bibliothèque nationale de France, et depuis une douzaine d’années, en plus du baroque, j’ai entamé des recherches sur la musique romantique française. Je suis un rat de bibliothèque et je propose généralement des choses inédites. Je viens de diriger l’opéra Lancelot, de Victorin Joncières, à l’Opéra de Saint-Étienne, et j’ai sorti Phrynée, de Camille Saint-Saëns, bref, des raretés qui sont des morceaux de patrimoine méconnu. Vous savez, il suffit de reprendre les programmes de théâtres parisiens entre 1830 et 1900, pour se rendre compte qu’il y a à peine 10% de choses que l’on connaît actuellement. Tout est là. On a l’embarras du choix. »

LVM: « Ce sont des œuvres qui ont été progressivement abandonnées? Pourquoi? Est-ce que la musique de concert tend à rétrécir son répertoire? »

Hervé Niquet: « C’est une affaire commerciale. Les gens sont timides de découvrir des choses qu’ils ne connaissent pas, pour plusieurs raisons. D’abord, un billet de concert coûte cher, si vous venez à deux, c’est le double, et il faut faire garder les enfants, payer le stationnement, et bien sûr on ira sans doute manger après le spectacle. C’est un investissement pour le plaisir, il ne faut pas se le cacher. Quand on met autant d’argent, on n’a pas envie d’être déçu avec des œuvres qu’on ne connaît pas. Les programmateurs incluent généralement un produit d’appel très connu en deuxième partie, et quelque chose de moins connu avant l’entracte. La place réservée pour ce qui est connu est plus grande que celle réservée à ce qui l’est moins. C’est normal. Il y a aussi le phénomène de mode. De plus, rappelons qu’avant, les compositeurs n’avaient pas de droits d’auteur. S’ils voulaient être payés à la commande, ils devaient produire énormément. Il y a donc beaucoup de choses qui sont tombées dans l’oubli parce que le flot de la musique arrivait par vagues entières. Les gens aimaient découvrir. Il fallait être étonné, à l’époque. »

LVM: « Évidemment, ce n’est pas votre domaine, mais cela ne laisse pas beaucoup de place aux compositeurs vivants. » 

Hervé Niquet: « Les compositeurs vivants auraient une plus grande place s’ils faisaient de la musique beaucoup plus écoutable. C’est bien, la musique contemporaine, mais si c’est pour se couper du public, que ce soit une ascèse, que l’on doive se martyriser pour aller l’écouter…sur la scène contemporaine aujourd’hui, ce qui fonctionne c’est la variété, c’est la comédie musicale, ça les gens y vont parce qu’il y a du bonheur. Il y a des concerts de musique contemporaine où vous avez 25 personnes dans la salle. Les compositeurs contemporains qui ont le souci du public sont peu nombreux, on le voit très bien. On n’a que ce qu’on mérite! »

LVM: « Est-ce que vos recherches de répertoire suivent un plan établi? »

Hervé Niquet: « Oui. Dans nos organisations professionnelles, on travaille trois ans à l’avance. Je peux vous dire, dans trois ans, où je serai, et ce que je vais jouer. Tout est très précis, jusqu’au minutage. Je fais de la recherche depuis plus de quarante ans, et j’ai des armoires entières de choses que j’aimerais faire mais dont je ne ferai pas 90%, parce que j’arrive en fin de carrière, même si j’ai enregistré plus de 130 disques. Tout est déjà là, prêt à être édité. »

LVM: « Vous pourrez certainement refiler ces partitions inutilisées à d’autres musiciens. » 

Hervé Niquet: « Bien sûr. Cela fait plus de 25 ans que j’enseigne et j’en ai donné à des étudiants, qui jouent ce que je voulais jouer. J’ai été directeur du Département de musique ancienne de Toulouse pendant près de huit ans, et j’ai formé une génération de musiciens, qui sont aujourd’hui devenus mes concurrents. Et c’est formidable. »

Charpentier: entre triomphe et piété, avec Clavecin en concert, sous la direction d’Hervé Niquet

Solistes

Myriam Leblanc, dessus
Catherine Saint-Arnaud, dessus
Philippe Gagné, haute-contre
Aldéo Jean, taille
Dominique Côté, basse

Programme

CHARPENTIER
Miserere des Jésuites, H. 219
Beatus vir, H. 208
Te Deum, H. 146

À Québec

Le 29 septembre, 19 h 30, Palais Montcalm. DÉTAILS ET BILLETS

À Montréal

Le 30 septembre, 19 h 30, Salle Bourgie. DÉTAILS ET BILLETS

 

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