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CRITIQUE | Bruce Liu: la révélation d'un grand artiste à la fois sage et lumineux

Par Caroline Rodgers le 18 février 2022

Hier soir, 17 février, j’ai eu le privilège de faire partie d’un petit groupe de personnes présentes à la Chapelle historique du Bon-Pasteur pour le premier récital de Bruce Liu en sol canadien depuis sa victoire au Concours Chopin, en octobre dernier. Une soirée que je n’oublierai jamais.

Il s’agissait d’un événement au profit du Concours Prix d’Europe, dont il fut le lauréat en 2015. Capté par Radio-Canada, ce récital sera diffusé sur ICI Musique, mardi soir, 20 h, à l’émission Toute une musique de Marie-Christine Trottier, qui nous a d’ailleurs adressé un mot de bienvenue. L’animateur officiel de la soirée était toutefois Jean Marchand, comédien mais aussi pianiste.

Je dois dire qu’avant le Concours Chopin qu’il a si brillamment remporté à l’automne, je n’avais pas réentendu Bruce Liu depuis 2014, alors qu’il était concurrent au CMIM. À l’époque, il n’avait pas fini parmi les trois premiers, et n’était âgé que de 17 ans. Je ne me souviens pas avoir formé d’opinion particulière à son sujet, outre une vague déception, puisqu’il avait remporté le Concours OSM deux ans plus tôt.

Par la suite, il s’est montré plutôt discret, travaillant, étudiant et participant à d’autres concours à l’étranger, mais ne donnant que peu ou pas de concerts ici. Disparaissant plus ou moins de l’écran radar médiatique, il a pris le temps de se développer. Sage décision.

Il s’agissait, bien sûr, d’un programme 100% Chopin, aménagé comme un crescendo vers la finale : l’Andante spianato et Grande Polonaise Brillante en mi bémol majeur.

Le tout commence donc dans la douceur avec le Nocturne en do dièse mineur op. 17 no 1, délicatement amené, comme si le pianiste gardait ses forces pour tout ce qui allait suivre. L’économie de gestes et le dosage de l’énergie font d’ailleurs partie de ses qualités. Avec lui, pas le moindre geste inutile, pas de mimiques indésirables (bien qu’il donne tout le récital masqué, ce qui nous empêche de voir l’expression de son visage). D’un calme quasi monastique, il garde son énergie pour ce qui compte le plus : créer la musique. Sa concentration est totale et le demeurera jusqu’à la dernière note. C’est suivi du Rondo à la mazur en fa majeur, dansant et plein de caractère.

Les Ballades

C’est avec les Ballades no 2 et 3 que l’on entre vraiment au cœur du récital et que l’on voit arriver, comme un choc, la hauteur vertigineuse de son intelligence musicale et pianistique. On comprend qu’au-delà de sa technique impeccable, Bruce Liu possède, à 24 ans, toutes les qualités d’un grand pianiste : la maîtrise d’une palette de nuances riche et complexe dont il se sert avec naturel, l’engagement total dans son jeu, un haut niveau d’expressivité et de musicalité, la profondeur, la sensibilité, le souci des détails tout en gardant une vision d’ensemble, et une personnalité d’artiste qui impressionne par son aplomb, sa façon d’être si entier dans le moment présent, et une maturité étonnante pour son âge.

Ce qui ressort aussi de son jeu, c’est une limpidité incroyable, une fluidité, une précision et une clarté remarquables dans l’énonciation du discours.

On pourrait parler, également, de l’humilité et de l’intégrité qu’il dégage. On sait que je déteste, pour employer une expression familière, les pianistes « flasheux » (inutile d’en nommer), à l’ego démesuré qui essaient constamment d’épater en montrant qu’ils peuvent jouer vite et fort, avec moult moulinets superflus. Très posé, Bruce Liu est aux antipodes de ces clowns, et on ne l’en apprécie que mieux.

À la pause, Jean Marchand nous lit les réponses du pianiste à ses questions posées au préalable, et celles-ci nous en révèlent un peu plus non seulement sur sa vie et sur son caractère, mais aussi sur son approche de la musique. Quand on lui demande deux choses qu’il est reconnaissant d’avoir appris de ses professeurs, la réponse est éclairante. De Richard Raymond, au Conservatoire de musique de Montréal, il a retenu la compréhension de la forme et de l’architecture des pièces, ce qui est grandement évident quand il joue. De Dang Thai Son, à l’Université de Montréal, il a appris l’importance de l’authenticité dans l’expression de sa personnalité artistique, une qualité qui ressort également de ses prestations.

La Sonate

Si les deux Ballades interprétées par Bruce Liu en avaient avancé la conquête, c’est certainement sa Sonate no 2 qui a gagné notre cœur. J’ai du mal à trouver les mots juste pour décrire tant de perfection et de beauté. L’interlude central de la Marche funèbre m’a fait pleurer. Le virtuose Presto final est éblouissant.

L’admiration demeure devant sa version du fameux Andante spianato, limpide et tendre, et la Grande Polonaise Brillante, précise, très détaillée mais éclatante et lumineuse, sans flous de pédale. Le bonheur.

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