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CRITIQUE | Stylus Phantasticus: de la musique pour les yeux, de la peinture pour les oreilles

Par Michel Joanny-Furtin le 3 avril 2019

Sur scène, Véronique Lacroix dirige 12 musiciens de l’ECM+ et le violoniste virtuose Victor Fournelle-Blain au fil d’une trame vidéo projetant une quarantaine de chefs-d’œuvre picturaux parcourant les styles moderne, surréaliste et cubiste. (Photo: courtoisie)
Sur scène, Véronique Lacroix dirige 12 musiciens de l’ECM+ et le violoniste virtuose Victor Fournelle-Blain au fil d’une trame vidéo projetant une quarantaine de chefs-d’œuvre picturaux parcourant les styles moderne, surréaliste et cubiste. (Photo: courtoisie)

Le compositeur Jean Lesage aurait été peintre s’il n’avait pas été musicien.

« Cette passion picturale a influencé sa manière de composer » a rappelé Véronique Lacroix en ouvrant ce concert si particulier, autant à voir qu’à entendre.

« Il a étudié le clavecin, ce qui l’a guidé dans la musique baroque et enrichi son approche des ornementations et des contrastes qui caractérisent sa musique. »

Principe musical du baroque allemand, le stylus phantasticus se démarque par l’invention et l’improvisation, et permet une alternance rapide des climats, des affects, des textures, des discours mélodiques très ouverts, libres et sans limites… sauf celles qu’on s’impose. En cela, cette démarche rappelle le mouvement surréaliste et le cubisme, où la narration mène au rêve et fait ressortir l’étrangeté des objets et des sujets familiers.

Choisis par le compositeur, plusieurs tableaux de grands maîtres (Manet, Vélasquez, etc.) et certains fragments sont ainsi projetés en fond de scène en parallèle des réinterprétations qu’en ont fait les peintres surréalistes et cubistes Picasso, Metzinger, Magritte, Chirico, etc.

Toutes les œuvres présentées dans ce Stylus Phantasticus mêlent avec doigté la peinture et la musique.

Selon Jean Lesage, « interpréter, c’est aussi recomposer », disait Glenn Gould. À la manière de Picasso – qui a fait 58 versions de Las Méninas de Velasquez – le compositeur québécois a réécrit une mélodie de Mozart, présentée auparavant par la pianiste Pamela Reimer en début de concert, qu’il a intitulé Le projet Amadeus.

Une démarche pour « se dé-familiariser de Mozart » dit Lesage, et qui permet d’en mieux apprécier la composition. Au bout du compte, voici une œuvre chatoyante et ludique, pleine de surprises et d’humour qui oscille entre les codes, les sons, les instruments, s’en affranchit souvent et y revient sans cesse.

« Cette narration non linéaire s’apparente au rêve et prend des motifs familiers que la composition recombine dans une signification différente, explique Jean Lesage, lors des interventions entre les œuvres.

« Ce n’est pas un emprunt ou une citation, c’est l’œuvre elle-même qu’on réinterprète selon le prisme du Cubisme ou du Surréalisme. Une déconstruction de plusieurs perspectives en une seule. »

Cet approche surréaliste teinte le Quatuor à cordes IV, « une mosaïque énigmatique » selon Véronique Lacroix, un voyage alternatif entre de multiples paysages sonores et riche d’émotions diverses, parfois sombres, parfois enjouées, étranges ou rêveuses mais selon un cheminement toujours serein entre les toiles de Miro, Chirico, Ernst, etc.

Ivresse songes sourdes nuits est un « ovni » musical dans le (très) bon sens du terme. Un accompagnement inter-dimensionnel. Sobre mais profond.

Ce solo de violon image le morcellement contradictoire de nos sentiments les plus intérieurs qui se révèlent, apaisés, lors d’un rêve éveillé. Un moment de grâce diaboliquement interprété par Victor Fournelle-Blain, au milieu même du public. Le pur exemple du stylus phantasticus.

Pour finir, Soliloques aux figures éphémères rassemble tous les musiciens auxquels s’ajoute le violon de Victor Fournelle-Blain. D’une forme plus classique, ce concerto en trois mouvements se présente comme un ensemble restitutif de toutes les images et émotions des œuvres précédentes.

La composition se risque à mêler les archets et les percussions, créant de nouvelles couleurs sonores qui ouvre l’esprit, élargit notre écoute. Si le soliste « mène la danse » au gré de ses pensées, il raccompagne ainsi l’auditoire, comme le ferait un hôte, vers la réalité du présent sous les bons auspices de l’orchestre qui replante le décor.

Ponctué d’images projetées pendant les œuvres et d’interventions explicatives entre elles, je recommande ce concert aux néophytes en musique contemporaine. Idéal pour commencer la découverte et l’aventure !

Ce concert était le premier d’une tournée du Conseil des Arts de Montréal. Il sera présenté les 3 avril (Quai 5160, Verdun, 19h30), le 7 avril (Théâtre Saputo, Saint-Léonard, 16h), le 10 avril (Maison Claude-Léveillé, Villeray, 20h), 13 avril (Maison culturelle, Montréal-Nord, 19h30), 28 avril (Pavillon de l’Entrepôt, Lachine, 11h) et le 9 mai (Théâtre Paradoxe, Sud-Ouest, 20h).

 

 

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