Ludwig Van Montreal

CRITIQUE | Le CMIM Voix 2025 finit en beauté

Theodore Platt, Fleuranne Brockway et Junho Hwang. (Photo : Tam Photography)
Theodore Platt, Fleuranne Brockway et Junho Hwang. (Photo : Tam Photography)

par Emmanuell Clews

Hier soir, vendredi 6 juin, avait lieu la grande finale de l’édition Voix 2025 du Concours de musique international de Montréal (CMIM Voix). Les cinq chanteur·ses finalistes y ont présenté trois airs chacun·e, accompagné·e·s par l’Orchestre symphonique de Montréal (OSM) sous la direction du chef invité Patrick Summers.

Yewon Han

La soirée a été lancée par la soprano Yewon Han de Corée du Sud, interprétant « Chacun le sait » de l’opéra La fille du régimen de Gaetano Donizetti, « Una voce poco fa » tiré du Barbier de Séville de Gioachino Rossini, et « Ah! non credea mirarti » de La sonnambula de Vincenzo Bellini. Elle possède un instrument vocal délicieux au timbre très clair, ce qui rendait particulièrement décevants les quelques manques de précision et de justesse. Han démontrait une certaine compréhension des textes, mais on voyait que son jeu théâtral servait autant à raconter l’histoire qu’à camoufler un certain trac, qui était probablement la raison des faiblesses vocales occasionnelles. Elle a brillé malgré tout par son soutien, son agileté et son grand registre.

Julia Muzychenko-Greenhalgh

La deuxième chanteuse était Julia Muzychenko-Greenhalgh, une soprano russe. Elle a présenté « Je marche sur tous les chemins » (Manon) de Jules Massenet, « Ivan Sergeich, khochesh’, v sad poydyom? » (La fiancée du Tsar) de Nikolaï Rimski-Korsakov, et « È strano… Sempre libera » (La Traviata) de Giuseppe Verdi. Ses nuances étaient très bien maîtrisées; elle a mis en valeur plusieurs fois un suraigu pianissimo très impressionnant. Son timbre si joli remplissait la Maison Symphonique tant dans les passages plus doux que dans les finales grandioses. Par contre, ses choix d’interprétation l’emmenaient souvent à basculer son regard et son poids d’un côté à l’autre, signe d’un manque de précision dans ses intentions de personnnage.

Theodore Platt

C’est à Theodore Platt, du Royaume-Uni, que revenait de conclure la première partie avec « O vin, dissipe la tristesse » (Hamlet) de Ambroise Thomas, « Ich atmet’ einen linden Duft » (Rückert-Lieder) de Gustav Mahler, et « Ja vas lyublyu » (Pikoyava dama) de Piotr Ilitch Tchaïkovski. Peut-être était-ce question d’acoustique, mais il manquait de résonnance dans sa voix; elle sonnait très feutrée, presque étouffée. Cependant, il la contrôle très bien, avec justesse et douceur. Il faisait beaucoup de petits déplacements sur la scène, lui aussi faisant signe d’imprécision dans ses intentions.

Fleuranne Brockway

Après la pause,c’était au tour de l’Australienne Fleuranne Brockway de s’avancer sur scène pour chanter « Près des remparts de Séville » (Carmen) de Georges Bizet, « Werther… qui m’aurait dit la place » (Werther) de Jules Massenet, et « Se Romeo t’uccise un figlio » (I Capuleti e i Montecchi) de Vincenzo Bellini. La mezzo-soprano a un timbre plus rond et plus mature que les deux autres chanteuses de la soirée.  Ses intentions, ses nuances et ses déplacements bien précis lui donnaient une prestance captivante. Elle semblait très en contrôle de son instrument, démontrant à la fois un registre grave bien timbré et des aigus clairs et justes.

Junho Hwang

Le dernier participant à être entendu était le ténor Junho Hwang, de Corée du Sud. Il a présenté les airs « Che gelida manino » (La bohème) de Giacomo Puccini, « Vzglyani, pod otdalyonnim svodom » (Aleko) de Sergueï Rachmaninov, et « Il était une fois à la cour d’Eisenach » (Les Contes d’Hoffmann) de Jacques Offenbach. Sa technique vocale était particulièrement impressionnante. Son deuxième air n’était accompagné que par la harpe, ce qui permettait au public de profiter pleinement de la diction parfaite du chanteur. Chaque consonne était prononcée avec une précision calculée et les voyelles étaient placées parfaitement pour faire résonner chaque note. Il semble avoir étudié chaque mot et chaque note avec minutie. Sa présence scénique a particulièrement brillé dans le Offenbach, qu’il a agrémenté de petites chorégraphies et de postures exagérées pour en mettre en relief le ton humoristique. Cet humour léger ne l’a pas empêché de conserver la même sincérité qu’il avait présentée dans les deux airs précédents. Hwang s’est vraiment démarqué par son jeu théâtral.

Composition du jury

Le jury international de cette édition Voix 2025 du CMIM était composé de Harolyn Blackwell, Iain Burnside, Étienne Dupuis, Anthony Freud, Roberto Mauro, Christina Scheppelmann et Delores Ziegler, sous la présidence de  la soprano Adrianne Pieczonka.

 

Fleuranne Brockway lors de sa prestation en finale avec l’OSM et Patrick Summers. (Photo : Tam Photography)

Grands Prix

Après la délibération du jury, les remerciements aux commanditaires et une mention d’appréciation pour tous les participant·e·s du concours, les gagnant·e·s ont été annoncé·e·s :

À notre avis, les prestations de Hwang et Brockway étaient toutes deux si bien maîtrisées que le grand prix aurait pu être attribué aussi bien à l’un ou à l’autre.

Prix spéciaux

Les prix suivants avaient déjà été attribués au fil des épreuves précédentes :

Félicitations à tous·tes les finalistes pour un concert bien réussi et à l’OSM de les avoir si bien accompagné·e·s avec si peu de temps de préparation, avec une mention spéciale à la harpiste Jennifer Swartz pour son accompagnement de l’air de Rachmaninov chanté par Junho Hwang.

Toutes les prestations de l’ensemble du concours peuvent être visionnées sur le site du CMIM.

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