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CRITIQUE | Denis Kozhukhin et I Musici : un concert en contrastes

Le pianiste Denis Kozhukhin était l'invité d'I Musici jeudi soir. (Photo : courtoisie)
Le pianiste Denis Kozhukhin était l’invité d’I Musici jeudi soir. (Photo : courtoisie)

Ce jeudi 28 novembre, I Musici lançait sa saison 2024-2025 à la salle Pierre-Mercure devant un parterre comble. Initialement prévu en troisième position d’une saison qui devait compter neuf événements, ce programme d’ouverture s’est révélé un jeu de contrastes musicaux et stylistiques, sous la direction de l’altiste ukraino-britannique récemment devenu également chef d’orchestre Maxim Rysanov.

Avant que les premières notes ne résonnent, Julie Triquet, violon solo, et Amélie Benoît-Bastien ont pris la parole pour remercier le public et annoncer qu’elles occupent désormais respectivement les postes de présidente et vice-présidente du conseil d’administration de l’orchestre. Ce discours a aussi été l’occasion de rappeler les défis financiers auxquels fait face l’ensemble, ne recevant que 60 % des subventions nécessaires à son fonctionnement pour les quatre prochaines années.

Un programme entre tradition et modernité

Le concert s’est ouvert avec l’Adagio et fugue en do mineur de Mozart. Dans cette œuvre, la tension dramatique des cordes et la rigueur contrapuntique mêlant gravité et énergie semblaient faire écho à la détermination des musicien·ne·s à faire entendre leur voix, celle de la musique classique et de leur orchestre.

Le premier temps fort de la soirée est venu avec le Concerto pour piano no 18 en si bémol majeur, K. 456 de Mozart, mettant en vedette le pianiste belge d’origine russe Denis Kozhukhin. Le discours du pianiste manquait parfois d’unité avec le style mozartien avec un Allegro vivace qui souffrait d’une utilisation excessive de la pédale, rendant certains passages moins articulés. Cependant, l’Andante un poco sostenuto a permis au soliste de briller par sa sensibilité, un dialogue soigné avec l’orchestre et sa façon de faire ressortir les subtilités harmoniques de l’œuvre. Le final, vif et virtuose, a atteint un équilibre plus convaincant entre expressivité et clarté.

En rappel, Kozhukhin a offert une interprétation touchante du Prélude en si mineur BWV 855 de Bach (arr. Siloti) dans un moment suspendu où le pianiste a dévoilé une facette plus introspective.

Exploration contemporaine avec Silvestrov

Après l’entracte, l’orchestre s’est aventuré dans des territoires plus contemporains avec Der Bote (Le messager) et Stille Musik (Musique calme) du compositeur ukrainien Valentyne Silvestrov. Dans la première pièce, l’alternance entre les cordes et un enregistrement sonore simulant un effet de vent a quelque peu atténué l’intention initiale d’un piano una corda. Le lyrisme du premier violon prenait parfois le dessus et diminuait la volonté fantomatique et flottante souhaitée de la partition qui se voulait un hommage au décès de la femme du compositeur.

Avec Stille Musik, Rysanov a ajouté une dimension littéraire en ponctuant les trois parties de textes (en anglais) du poète ukrainien Ivan Franko. Si la deuxième section aurait gagné à accentuer son léger clin d’œil à Schubert, l’ensemble a néanmoins su maintenir une cohésion musicale convaincante.

La révélation : Mozart

La soirée s’est conclue avec la Symphonie no 33 en si bémol majeur, K. 319, de Mozart. Dans cette œuvre, l’orchestre s’est révélé admirable en offrant des lignes mélodiques assurées aux cordes, un phrasé dynamique et une section de vents remarquable. L’orchestre a ici transmis toute sa vitalité dans une exécution impeccable.

Bien que l’enthousiasme du public ait interrompu la fluidité de l’exécution avec des applaudissements entre les mouvements de chacune des œuvres au programme, les ovations finales ont su témoigner d’un engagement et d’un engouement bien mérités pour I Musici.

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