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REPORTAGE | L’Orchestre Métropolitain en résidence à la salle Bourgie: loin mais proche

Orchestre Métropolitain en enregistrement à la salle Bourgie en distanciation

Rassemblés de nouveau depuis lundi, les musiciens de l’Orchestre Métropolitain et leur chef Yannick Nézet-Séguin enregistrent cette semaine le premier volet d’une quasi-intégrale des symphonies de Beethoven (seule la neuvième est exclue, l’espace ne permettant pas d’intégrer un chœur suffisant en respectant la distanciation).

Le décor de la salle Bourgie a beau être familier et les mélodies qui émanent de l’Orchestre Métropolitain bien connues, tout par ailleurs contribue à rappeler au visiteur l’étrangeté de la situation : les flèches indiquant les sens uniques à suivre, la salle Bourgie dépouillée de ses sièges au parterre, les instrumentistes installés à distance réglementaire, chacun à son pupitre individuel.

Malgré ces bouleversements, le bonheur qu’éprouvent les musiciens de l’Orchestre Métropolitain et leur chef à se retrouver et à refaire de la musique ensemble est palpable. Nézet-Séguin admet avoir choisi intentionnellement deux des symphonies les plus joyeuses pour commencer, soit les deuxième et quatrième. Elles comptent aussi parmi celles à l’instrumentation la plus restreinte, permettant sans doute aux musiciens de l’orchestre une première adaptation sans les trombones, qui se joindront à leurs collègues dans trois semaines pour les cinquième et sixième symphonies.

 

 

L’Orchestre Métropolitain envahit le parterre de la salle Bourgie pour son enregistrement des symphonies de Beethoven. (crédit : François Goupil)

La longue réverbération de la salle Bourgie, augmentée par l’absence de bancs et de public, ne fait rien pour faciliter la tâche à l’orchestre, déjà déstabilisé par sa configuration éparse. Si le premier mouvement de la quatrième symphonie, par laquelle commence la séance d’enregistrement de ce mercredi après-midi, témoigne de certains décalages dans les attaques, on sent l’aisance s’installer progressivement, alors que les cuivres réussissent à anticiper avec maîtrise.

Nézet-Séguin souligne un effet imprévu de la distanciation : dans la section des cordes, où les musiciens peuvent généralement compter sur l’appui de leur voisin de pupitre, la plus grande distance et le fait d’être seul à son lutrin oblige chaque joueur à assumer l’unique responsabilité de sa partie et à écouter plus. « Je ne dis pas que c’est idéal, de jouer comme ça, dit le chef, mais on peut y trouver des avantages. »

 

 

Yannick Nézet-Séguin était heureux de retrouver sa « famille » de l’Orchestre Métropolitain. (crédit : François Goupil)

 

Celui qui se considère un grand optimiste est reconnaissant que l’Orchestre Métropolitain ait pu profiter de conditions lui permettant de reprendre ses activités, alors que les deux autres ensembles nord-américains auxquels il est rattaché, le Metropolitan Opera de New York et l’Orchestre de Philadelphie, n’ont pas cette chance. Il reconnaît aussi que tous les musiciens ne sont pas rattachés à une institution et que la reprise sera plus dure pour les musiciens pigistes.

Malgré tout, il croit que cette crise peut être l’occasion pour le monde symphonique de dresser un bilan et d’innover en intégrant plus d’activités numériques à son calendrier régulier, sans compromettre la primauté de sa relation en direct avec le public.

 

On est capable d’en sortir grandi – et peut-être d’éliminer ce qu’il y avait de trop, ce qu’on faisait par routine. Je souhaite qu’on profite maintenant de chaque occasion d’être ensemble, l’orchestre et le public, et qu’on ne prenne pas ça pour acquis. – Yannick Nézet-Séguin

 

Comme souvent, la musique se trouve à être ainsi un miroir de la vraie vie, puisque c’est là la leçon que plusieurs tireront de cette période de confinement forcé.

 

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